Page:Les anciens couvents de Lyon.pdf/220

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
203
LES CARMES

supplice, ils allaient l’exhorter dans sa prison, l’accompagnaient, en priant, jusqu’au dernier moment ; puis, après la mort et après avoir baisé la terre au pied du gibet, ils ensevelissaient le supplicié, le portaient sur leurs épaules jusqu’à la chapelle des Pénitents, où l’on continuait les prières et où on l’inhumait dans un caveau destiné aux criminels. Quelle compatissante charité !

Cette chapelle des Pénitents fut le théâtre d’un conflit, qui causa dans la ville une véritable émotion. Dans le contrat de vente passé entre les Pénitents et les Carmes, ceux-ci avaient, selon la coutume des communautés religieuses, stipulé à leur profit certains avantages. Ils s’étaient réservé, outre une redevance annuelle, le droit exclusif de fournir aux Pénitents leurs confesseurs, leurs prédicateurs et leurs officiants, à moins qu’ils ne consentissent parfois à approuver tout autre ecclésiastique. Ce premier traité fut changé en 1642, quand les Pénitents furent obligés d’agrandir leur chapelle ; les Carmes permirent d’employer d’autres prêtres que les religieux, certaines fêtes exceptées. Mais il fut expressément convenu que l’on n’y prêcherait jamais pendant le temps des prédications faites dans l’église des Carmes, et que si les Pénitents pouvaient prendre les ecclésiastiques qui leur plairaient pour des exhortations et messes de dévotion, ces exercices ne pourraient être annuels, et à plus forte raison mensuels ou hebdomadaires.

Or, en 1675, un vicaire général de Lyon, M. Morange, voulant fonder une association à la Passion de Notre-Seigneur, sollicita des Carmes l’autorisation de se servir de la chapelle des Pénitents. Cette concession gracieuse ne devait être que temporaire, et le vicaire général offrait d’en donner la déclaration écrite. Par égard pour la dignité du solliciteur, les Carmes ne l’exigèrent pas ; l’autorisation demandée fut accordée à M. Morange, et dès lors, tous les vendredis, une foule de fidèles fréquenta la chapelle des Pénitents de la Miséricorde.

Deux ans et demi après, ce provisoire n’avait pas changé. Les Carmes, déjà mécontents, perdirent patience quand ils apprirent que le grand-vicaire venait de faire afficher et prôner publiquement