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L’ABBAYE D’AINAY

étaient adoucies par la joie de leur confession, par l’attente du martyre, l’espérance d’un bonheur éternel, l’amour pour Jésus-Christ et l’Esprit de Dieu le Père. Mais ceux-là étaient tellement tourmentés par leurs remords que, lorsqu’ils paraissaient devant le peuple, on les distinguait à leur air consterné. Sur le visage des uns brillaient le bonheur, la majesté, une sainte joie ; leurs chaînes leur donnaient autant de grâce que les bracelets et les franges d’or en donnent à l’épouse le jour de ses noces ; ils répandaient autour d’eux la céleste odeur de Jésus-Christ, de telle sorte que plusieurs pensaient qu’ils se servaient de parfums précieux. Pour les autres, l’œil morne, la contenance embarrassée, la démarche pénible, ils étaient l’objet des railleries amères des gentils, qui les taxaient de trahison et de lâcheté ; parce qu’ils avaient renoncé au nom glorieux de Jésus-Christ, on les poursuivait du titre d’homicides. Ce triste spectacle contribuait beaucoup à fortifier les confesseurs, et si quelque autre chrétien venait à être arrêté, il s’empressait de confesser la foi pour prévenir toute tentative d’apostasie.

« Cependant, par la diversité de leurs supplices, les martyrs devaient être comme une couronne composée de diverses fleurs que Notre-Seigneur Jésus-Christ offrait à son Père, des mains de qui les généreux combattants allaient enfin recevoir la récompense due à leur courage. Maturus, Sanctus, Blandine et Attale furent les premiers condamnés à être dévorés par les bêtes dans l’amphithéâtre. À cette occasion, on donna au peuple un jour de spectacle dont nos saints martyrs devaient faire tous les frais. Maturus et Sanctus supportèrent de nouveau toute sorte de supplices, comme s’ils n’eussent rien souffert encore, ou plutôt comme de généreux athlètes qui, déjà vainqueurs plusieurs fois, combattaient pour le prix de la dernière victoire. Ils furent d’abord déchirés à coups de verges, selon la coutume, ensuite abandonnés aux bêtes, dont la férocité se réveillait à la vue d’un corps sanglant, et enfin livrés à tous les tourments que demandait à grands cris la capricieuse barbarie de l’assemblée. Elle voulut qu’on les fît asseoir sur la chaise