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TREIZIÈME AVENTURE.

bien ! de vrais démons dont il ne faut pas même parler, tant on auroit de mal à en dire. Le vilain n’a pas d’amis, il n’a pitié de personne. Mais, sire compain, n’êtes-vous pas blessé ? en tout cas, remercions bien Dieu de vous avoir sauvé la vie. Reposez-vous, et puis nous irons voir si nous pouvons ailleurs trouver à manger ; car vous avez bien faim, n’est-ce pas ? — Hélas ! oui », répond Primaut, qui ne voyoit pas Renart lui faire une lippe de toute la longueur de sa langue ; « je ne sais de quoi je souffre le plus, de la faim ou des coups que j’ai reçus. »

Les deux amis s’étendent alors sur l’herbe fraîche ; Primaut en grommelant contre les vilains, Renart en prenant gaiement le temps, la tête enroulée dans ses pattes. C’est ainsi qu’il se laisse aller au sommeil du juste que ne trouble aucun regret et dont tous les vœux sont remplis.