Page:Les illégalités et les crimes du Congo, 1905.djvu/35

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est le grand responsable, qui est le grand coupable, et ceux qui sont surtout responsables, ce sont ceux qui sont à la tête de ce système, ce sont ceux qui ordonnent ce système et qui hypocritement, mensongèrement, s’efforcent de le nier.

Tenez ! voulez-vous que je vous cite un fait à l’appui ?… (Oui ! oui !)… Tout à l’heure M. Viollet disait que la Cour de Cassation avait naguère rendu un arrêt légitimant en quelque sorte l’esclavage, la traite sur terre, à la suite d’un appel qui lui avait été déféré par M. Roume, Gouverneur général de l’Afrique occidentale qui voulait supprimer l’esclavage dans sa colonie. Et bien ! non, Monsieur Viollet, ce n’est pas tout à fait exact. Il y a, au Sénégal, des villages de captifs, il y a, à Saint-Louis, à Dakar, des captifs, des hommes non libres, des personnes humaines qui ne sont point libres au regard des règlements de là-bas. Je ne parle pas de la loi française. Un jour, un indigène de Saint Louis est allé sur la rivière avec la commission d’acheter une fillette et de la ramener à Saint-Louis. Il acheta la fillette, préleva la commission sur le prix et revint à Saint-Louis. La fillette qu’il avait achetée avait été volée à ses parents. La mère suivit le ravisseur à la trace, vint à Saint-Louis, et, à la suite de circonstances qu’il serait trop long d’indiquer, parvint jusqu’au Procureur général. Là, le Procureur général invité à requérir contre ce Sénégalais qui, hélas ! investi des droits de citoyen français, imitait ses professeurs de civilisation… (applaudissements)… en faisant la traite des esclaves, le Procureur général, ouvrit une enquête et dit qu’on ne pouvait pas poursuivre ce Sénégalais parce qu’il avait fait la traite ; que, d’ailleurs, c’était un fait de notoriété publique attendu que M. un tel, ingénieur, M. un tel, des blancs demeurant au Sénégal, avaient été fournis par lui à diverses reprises d’esclaves et qu’au surplus, si l’on devait poursuivre ce Sénégalais pour fait de traite, la moitié des Européens de Saint-Louis et de Dakar devaient être poursuivis de même façon. Ceci, citoyens et citoyennes, est inscrit et dit dans une pièce officielle, dans un document dont je n’ai pas le numéro présent à la mémoire, dans la correspondance officielle