Page:Les illégalités et les crimes du Congo, 1905.djvu/36

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du Procureur général à Saint-Louis. Alors, il y eut un magistrat… (Mouvement.)

Je blesse peut-être des susceptibilités !

Une voix. — Oui, vous généralisez.

M. Gustave Rouanet. — On ne parle jamais de ces histoires là sans blesser quelques susceptibilités. Dernièrement, quelqu’un vint me voir au journal. Je lui parlai d’un fonctionnaire indo-chinois qui m’avait parlé des Annamites en excellents termes. Je lui dis : « Est-ce que vous connaissez ce monsieur ? » « Oui, me dit-il. Il semble qu’il a la main un peu dure…, c’est un Africain. Il a été aux Comores. » Et alors je lui dis : « Connaissez-vous un certain M. Bénévent ?… J’ai reçu une lettre d’un ingénieur qui a été sur les lieux… Ce Bénévent aurait fail scier le cou avec un couteau à deux indigènes, dont l’un avait été pris sur ses chantiers. » Il me répondit : « Cela m’étonne, c’est un de mes amis. Cela peut arriver à tout le monde, mais cela m’étonne. »

Vous voyez qu’on n’est jamais sûr, dans une réunion comme celle-ci, que ce qu’on dit n’éveille pas quelques susceptibilités

Eh bien ! il y avait au Sénégal un procureur de la République, M. Briffaut, qui voulut faire son devoir. Des Pons contre l’esclavage furent ordonnées par lui. Il y eut acquittement. M. Briffaut protesta. Des associations maçonniques protestèrent. Alors M. Roume, bien loin de vouloir supprimer l’esclavage dans l’Afrique occidentale, demanda par deux fois à M Doumergue, ministre des colonies, et par un troisième câblogramme, avant d’arriver M. Clémentel, ministre des colonies actuel, le rappel de ce magistrat qui poursuivait pour faits d’esclavage ; et c’est sur des injonctions parties de Paris, la suite de protestations venues des Européens de là-bas, qu’un appel fut fait devant la Cour de cassation. Mais sur quoi était fait l’appel ? On s’appuyait sur la loi relative à la traite maritime. La Cour de cassation jugeait en droit ; elle n’avait pas à invoquer d’autres principes que ceux sur lesquels reposait l’appel a minima ; et elle déclara que la loi sur la traite maritime ne s’applique pas à la traite par terre.