Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/187

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par Giotto avec grand soin ; il représentait la mort de la vierge entourée par les Apôtres et avec le Christ qui reçoit son âme. Cette œuvre qui était très admirée par tous les peintres, particulièrement par Michel-Ange Buonarroti, a été depuis enlevée par je ne sais qui, estimant peut-être qu’on ne l’appréciait pas assez[1].

Le 9 juillet de l’an 1334, Giotto mit la main au campanile de Santa Maria del Fiore. Après avoir fouillé le sol à la profondeur de vingt brasses, il établit comme fondation une couche de pierres dures, dans la partie qu’on avait asséchée, et y posa un massif de béton haut de douze brasses qu’il termina ensuite par huit brasses en pierres de taille. À ce début ou fondation, assista l’évêque de la ville qui posa solennellement la première pierre en présence du clergé et de tous les magistrats[2]. Tandis qu’on continuait ensuite à édifier la tour dans le style tudesque [gothique] de l’époque, Giotto dessina tous les sujets qui devaient entrer dans l’ornementation, et répartit soigneusement sur le modèle les couleurs blanches, noires et rouges, à toutes les places où il devait y avoir des pierres ou des frises de ces couleurs. Le plan est un carré parfait, dont chaque face a vingt-cinq brasses, ce qui fait cent brasses de tour ; la hauteur atteint cent quarante-quatre brasses. Si l’on croit ce qu’en écrivit Lorenzo di Clone Ghiberti, Giotto non seulement fit le modèle du campanile, mais encore il sculpta en relief une partie des sujets de marbre, où sont représentés les maîtres de tous les arts. Il affirme en avoir vu des modèles en relief de la main même de Giotto, en particulier ceux de cette œuvre, ce qui est très croyable, si l’on réfléchit que du dessin et de l’invention procèdent tous les arts. Suivant le projet de Giotto, le campanile devait se terminer, à partir du point actuel de terminaison, par une flèche ou pyramide quadrangulaire, haute de cinquante brasses, mais les architectes modernes ont toujours conseillé de ne pas exécuter cet ornement gothique et suranné, trouvant l’aspect actuel meilleur en soi.

En récompense de ses travaux, la république de Florence accorda à Giotto non seulement le titre de citoyen mais encore une pension annuelle de cent florins d’or, ce qui était beaucoup pour l’époque, et le nomma provéditeur des travaux du campanile[3], dont la construction fut poursuivie après lui par Taddeo Gaddi, car il ne vécut pas assez pour la voir terminée. Tandis qu’on y travaillait, il fit un tableau

  1. C’est peut-être le tableau du musée de Chantilly.
  2. Le 18 juillet, dit Villani, livre XI, chap. XII.
  3. Le 12 avril 1334, nommé à la haute direction des travaux de Santa Reparata, ainsi que tous les travaux de fortification et d’édilité.