Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/367

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l’orgue[1], qui est au-dessus de la porte de la vieille sacristie, avec ces figures ébauchées comme on l’a déjà dit, qui paraissent vraiment douées de vie et de mouvement. On peut dire qu’il travaillait autant de la tête que des mains. Que d’ouvrages, admirables dans l’atelier, produisent un effet pitoyable dès qu’on les change de place, et même dès qu’on les soumet à un autre jour ! Donato, au contraire, préparait toujours ses figures de telle sorte que, dans l’atelier où il travaillait, elles ne paraissaient pas la moitié aussi belles qu’une fois mises en place. Dans la sacristie neuve, il donna le dessin de ces enfants qui tiennent des festons et font le tour de la frise, ainsi que celui des figures qui composent le vitrail de l’œil-de-bœuf, sous la coupole et qui représentent le Couronnement de la Vierge[2] ; ce dessin est tellement supérieur aux vitraux des autres œils-de-bœuf, qu’on s’en rend compte manifestement.

À Or San Michele, il exécuta en marbre, pour l’Art des Bouchers, la statue de saint Pierre[3], pleine de tant de science et de beauté, et, pour l’Art des marchands de lin, un saint Marc évangéliste[4], qu’il devait faire concurremment avec Filippo Brunelleschi, mais que celui-ci lui abandonna. Quand les consuls de l’Art virent cette figure, que Donatello avait exécutée avec un grand jugement, mais qui, étant modelée en terre, ne pouvait pas être appréciée à sa juste valeur par ceux qui ne s’y entendaient point, ils ne voulurent pas la laisser mettre en œuvre ; Donato leur dit de le laisser faire et qu’il voulait leur montrer, en la reprenant, une nouvelle figure et non plus celle qui ne leur plaisait pas. Il la tint alors renfermée pendant quinze jours, puis la découvrit sans y avoir autrement touché, et chacun de l’admirer.

Pour l’Art des Armuriers, il fit un saint Georges[5] recouvert de son armure, qui paraît vivant et dans la tête duquel on reconnaît la beauté de la jeunesse, le courage militaire et une fierté vraiment terrible ; il a une attitude si merveilleuse qu’on dirait qu’il va se mouvoir. Certes, dans aucune œuvre moderne, on n’a encore vu autant de mouvement et d’animation que la nature et l’art en mirent dans celle-ci par la main de Donato. Sur le soubassement de la niche qui renferme cette figure, il plaça un bas-relief en marbre, qui représente saint-Georges, à cheval, combattant le dragon ; le cheval est très estimé.

  1. Actuellement au Musée du Dôme ; commandé en 1433.
  2. En 1434, concurremment avec Ghiberti.
  3. En place.
  4. En place 1411-1413.
  5. En 1416 ; actuellement au Musée National ; remplacé dans sa niche par une copie, primitivement il occupait la 3e niche, actuellement vide du côté sud.