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rieures. Au-dessus de la porte de l’Œuvre, face à San Giovanni, il fit également un petit saint Jean[1], en ronde-bosse, d’un beau travail qui fut beaucoup admiré.

Michelozzo fut si apprécié par Cosme de Médicis, dont il fréquentait la maison, que celui-ci lui fit faire le modèle du palais[2] qui est au coin de la Via Larga, auprès de San Giovannino. Le modèle fait antérieurement par Filippo Brunelleschi, comme on l’a dit dans la Vie de celui-ci, avait paru à Cosme trop somptueux et devant plutôt exciter l’envie de ses concitoyens qu’embellir la cité et apporter à lui-même grande commodité. Celui de Michelozzo lui plut, et fut conduit par ce maître au point de perfection que nous voyons aujourd’hui.

L’an 1433, Cosme ayant été exilé, Michelozzo, qui l’aimait infiniment et lui était fidèlement attaché, le suivit spontanément à Venise et voulut y résider avec lui. Outre de nombreux dessins et modèles d’édifices publics et privés qu’il fit pour des amis de Cosme et d’autres gentilshommes, il construisit, aux frais de Cosme, la bibliothèque de San Giorgio Maggiore, monastère des moines noirs de Sainte-Justine. Le bâtiment terminé, Cosme le remplit de livres. L’année suivante, rappelé dans sa patrie, il revint triomphant, et ramena Michelozzo avec lui.

À cette époque, le palais public de la Seigneurie commençait à menacer ruine, parce que plusieurs colonnes de la cour souffraient, soit du trop grand poids dont elles étaient chargées, soit de la faiblesse des fondations trop obliques, ou peut-être parce qu’elles étaient formées de blocs mal assemblés et mal scellés. Quelle que fût, du reste, la cause, Michelozzo fut chargé d’y remédier, ce qu’il accepta volontiers, parce que, à Venise, près de San Barnaba, il avait eu à parer à un semblable danger. Il reprit en sous-œuvre et refit les colonnes telles qu’elles sont aujourd’hui, après avoir étayé si fortement l’édifice que cette énorme masse ne souffrit aucunement et, depuis, n’a pas bougé d’une ligne. Puis il remplaça les colonnes trop vieilles par de nouvelles, et, pour qu’on les reconnût dans la suite, il les fit à huit pans, avec des chapiteaux dont les feuillages sont sculptés à la moderne, en sorte qu’on les distingue facilement des anciennes, dues à Arnolfo. Ensuite, sur ses conseils, on diminua le poids des murailles, qui chargaient les colonnes ; on refit toute la

  1. Actuellement au Musée National ; restitué à Rossellino, 1477 ; cette statue lui fut payée 25 florins d’or.
  2. Palais Riccardi, aujourd’hui préfecture de Florence.