Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/394

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nement de la Vierge[1]. Sur les volets de l’ancien orgue, il peignit sur toile une Annonciation[2] qui est aujourd’hui dans le couvent, en face de la porte du dortoir d’en bas, entre les deux cloîtres.

Pour son mérite, ce bon Père fut aimé par Cosme de Médicis au point que celui-ci, après avoir fait construire l’église et le couvent de San Marco, lui fit peindre, sur une des parois du Chapitre, toute la Passion de Jésus-Christ[3]. D’un côté sont tous les saints qui ont été chefs et fondateurs d’ordres religieux, pleurant amèrement au pied de la croix ; de l’autre, saint Marc l’évangéliste venant en aide à la Mère du Fils de Dieu qui s’est évanouie à la vue du Sauveur du monde crucifié ; autour d’elle sont les Maries désolées qui la soutiennent, saint Cosme et saint Damien. On dit que, sous la figure de saint Cosme, Fra Giovanni représenta, d’après nature, Nanni d’Antonio di Banco, sculpteur et son ami. Sous cette fresque, il peignit, dans la frise qui court au-dessus des dossiers d’appui, saint Dominique, au pied d’un arbre dont les branches portent des médaillons renfermant les portraits des papes, des cardinaux, des évêques, des saints et des maîtres en théologie qui avaient appartenu jusqu’à cette date à l’ordre des Prédicateurs. Grâce à l’aide des moines de son couvent, qui firent des recherches en divers lieux, il introduisit dans cette œuvre des portraits d’une authenticité incontestable, tels que ceux de saint Dominique, d’Innocent V et autres ; toutes ces têtes sont d’une beauté et d’une grâce remarquables.

Dans le premier cloître, il remplit les lunettes de plusieurs figures à fresque très belles, et il peignit un saint Dominique au pied d’un crucifix très estimé. Outre une quantité de peintures faites dans les cellules et sur les murs, il laissa dans le dortoir une peinture tirée du Nouveau Testament, aussi belle qu’on peut l’imaginer. Mais particulièrement beau et merveilleux est le tableau du maître-autel[4], dans l’église du couvent, parce que, outre la Madone qui pousse à la dévotion, par sa simplicité, quiconque la regarde, et les saints qui l’entourent et qui sont aussi beaux ; la prédelle[5] représentant le supplice de saint Cosme, de saint Damien et d’autres martyrs est si bien peinte qu’on ne saurait rien imaginer de plus soigné, de plus fin et de mieux entendu

  1. Ces différentes peintures n’existent plus.
  2. Ibid.
  3. Les peintures de Fra Giovanni au couvent de San Marco existent encore.
  4. Actuellement à l’Académie des Beaux-Arts ; il y travaillait en 1438.
  5. Actuellement divisée en plusieurs fragments qui se trouvent à l’Académie des Beaux-Arts de Florence et à la Pinacothèque de Munich.