Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/439

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sorte qu’elles se seraient trouvées préservées de tous ces vents empestés qui désolent Rome et qui auraient été débarrassées des eaux et des immondices qui, ordinairement, engendrent un mauvais air. Sans aucun doute, tout cela aurait été exécuté si Nicolas V eût vécu un peu plus longtemps, car il avait un esprit vaste et résolu et il s’entendait aux arts au point qu’il guidait et dirigeait lui-même les artistes, autant qu’eux le faisaient de lui.

Il voulait, en outre, élever le palais pontifical avec tant de grandeur et de magnificence, avec tant de commodité et d’élégance, qu’il aurait été, tout compte fait, le plus grand et le plus bel édifice de la chrétienté. Il devait servir non seulement à la personne du souverain pontife, mais encore au Sacré Collège des cardinaux qui, étant son conseil et son assistance, auraient été continuellement auprès de lui. Tous les offices, les bureaux de la cour devaient également y être commodément installés. On aurait pu y recevoir les empereurs, les rois, les ducs et les autres princes chrétiens qui, par leurs affaires ou leur dévotion, auraient été appelés auprès du Saint-Siège apostolique. Croira-t-on que Nicolas V voulait faire élever un amphithéâtre pour le couronnement des papes ! plus des jardins, des loges, des aqueducs, des fontaines, des chapelles, des bibliothèques et un conclave qui aurait été aussi commode que beau. En somme, cette édification (je ne sais si je dois lui donner le nom de château, de palais ou de ville) aurait été la plus superbe chose qui eût jamais été faite depuis la création du monde jusqu’à nos jours. Toute cette entreprise resta inachevée, même à peine commencée, à cause de la mort du pape, et le peu qui en fut élevé est reconnaissable à ses armes, deux clefs croisées sur un champ rouge. La cinquième œuvre qu’il avait eu l’idée de construire était l’église de Saint-Pierre, qu’il avait dessein de faire si grande, si riche et si ornée qu’il vaut mieux n’en rien dire, de peur de n’en donner, malgré tous nos efforts, qu’une bien faible idée, d’autant plus que le modèle a été perdu et que l’édifice a été élevé autrement par d’autres architectes. Tous les dessins et modèles furent demandés au génie et à l’industrie de Bernardo Rossellino[1].

Pour revenir à Antonio, que nous avons quitté pour traiter un si beau sujet, il exécuta des sculptures vers l’an 1490[2].


  1. Mort et enterré le 23 septembre 1464 à Santa Maria del Fiore (Livre des Morts de Florence).
  2. Erreur manifeste.