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Chapitre III. — Des sculptures en bas-relief et en demi-relief. De la difficulté de les faire. En quoi consiste la manière de les conduire à la perfection.

Les figures que les sculpteurs appellent demi-reliefs furent inventées par les Anciens, qui en composèrent des sujets, pour orner les murs lisses, et s’en servirent dans les théâtres, ou les arcs de triomphe. En effet, ayant fait des figures en ronde-bosse, ils ne pouvaient les poser s’ils ne ménageaient auparavant une salle ou une place qui fût entièrement dégagée. Voulant éviter cet inconvénient, ils trouvèrent une espèce de sculpture qu’ils appelèrent demi-relief, nom qu’on lui a conservé. En analogie avec la peinture, elle représente d’abord, en entier, les figures principales, en demi-relief, ou plus, comme dans la réalité, les deuxièmes figures à demi-cachées par les premières, et ainsi de suite, de la même manière qu’apparaissent les personnes vivantes, quand elles sont rassemblées et serrées les unes contre les autres. Dans cette espèce de demi-relief, à cause de la diminution de grandeur due à la perspective, on fait les dernières figures petites, et de même si l’on ne voit que les têtes, ainsi que les édifices et le paysage qui forment le fond du sujet. Personne n’a mieux exécuté que les Anciens cette espèce de demi-relief, tant pour l’observation que pour la diminution graduelle, et l’éloignement progressif des figures, les unes par rapport aux autres. Les Anciens, étant imitateurs du vrai et ingénieux, n’ont jamais fait de pareils tableaux, dans lesquels les figures soient placées sur un plan fuyant, ou qui se présente en raccourci ; au contraire, les figures posent leurs pieds sur la corniche inférieure, tandis que quelques-uns de nos artistes modernes, voulant faire paraître leur plus grand savoir, ont placé dans leurs sujets de demi-relief les premières figures sur un plan qui est en bas-relief et qui fuit, puis les figures suivantes sur le même plan, de manière qu’ainsi posées, elles n’ont pas leurs pieds appuyés avec cette assurance qu’elles devraient avoir. Il en résulte que l’on voit souvent les pointes des pieds de pareilles figures, qui font face en arrière, toucher l’os de la jambe, par un raccourci exagéré. C’est ce qu’on voit dans beaucoup d’œuvres modernes, entre autres, sur la porte de San Giovanni et autres œuvres du même temps. Aussi, les reliefs qui offrent ce caractère sont-ils faux, parce que si la moitié de la figure sort du bloc, et si on doit faire d’autres figures derrière les premières, il faut observer les règles de la perspective, en tant que fuite et diminution de grandeur, faire poser les pieds sur le plan, de manière que le plan soit plus en avant que les pieds, comme le veulent le coup d’œil et la règle dans les