Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 01.djvu/83

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plus capable dans les arts, s’exercer à dessiner des figures en relief de marbre, de pierre, ou encore des moulages faits soit sur l’original vivant, soit sur quelque belle statue antique ; ou bien encore des modèles en relief faits en terre, soit nus, soit couverts de chiffons glaisés qui représenteront les draperies et les vêtements. Tous ces objets, étant immobiles, et privés de sentiment, offrent grande facilité à celui qui dessine, à cause de leur fixité, ce qui n’arrive pas avec des objets vivants qui sont en continuel mouvement. Après qu’on aura, en dessinant de pareilles choses, acquis une bonne pratique, et qu’on aura assuré sa main, il faudra commencer à reproduire des choses de la nature, et s’efforcer par un travail assidu d’acquérir les mêmes qualités. En effet, les choses qui tiennent de la nature sont vraiment celles qui font honneur à celui qui a peiné à les reproduire, car elles ont en elles, outre une certaine grâce et vivacité, cette simplicité, cette facilité, cette douceur qui est le propre de la nature, qui s’apprend parfaitement par son étude, et ne s’acquiert jamais à un degré suffisant, si l’on se borne à l’étude des choses de l’art. Que l’on soit assuré que la pratique, que l’on obtient par des études de dessin prolongées pendant de longues années, est la vraie lumière du dessin, et ce qui fait les maîtres excellents. À présent, ayant suffisamment discouru de cela, nous en arrivons à examiner ce que c’est que la peinture.

C’est une surface plane, couverte de plaques de couleurs, que ce soit un panneau de bois, un mur ou une toile, et suivant les contours dont nous avons parlé plus haut, lesquels, grâce à un bon dessin de lignes tracées, circonscrivent les figures. Une pareille surface plane, exécutée par le peintre avec un jugement droit, est éclairée dans son milieu, obscure aux extrémités et dans le fond, et couverte dans les parties intermédiaires d’une couleur moyenne entre le clair et l’obscur. Ces trois champs étant fondus ensemble, il en résulte que tout ce qui est renfermé entre un trait et l’autre se relève et apparaît modelé et détaché du tableau. Il est vrai que ces trois champs ne peuvent suffire à détailler toute chose, parce qu’il est nécessaire de diviser chacun au moins en deux espèces, faisant deux gradations de couleur éclairée, et dans l’obscur deux plus claires, et divisant ensuite ces gradations encore en deux autres qui tirent l’une sur le plus clair et l’autre sur le plus foncé. Quand les teintes d’une seule couleur, quelles qu’elles soient, seront délayées, on verra peu à peu apparaître le clair, l’un peu moins clair, puis l’un peu plus obscur, de manière que peu à peu nous arriverons au noir franc. Ayant donc mélangé ces couleurs, que l’on veuille peindre à l’huile, à la détrempe ou à fresque, on