Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/101

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brasses de proportion, peinte sur bois, remarquable par la perfection du dessin et la beauté du travail. Salvador Billi, marchand florentin, ayant appris à son retour de Naples la renommée de Fra Bartolommeo et ayant vu ses œuvres, lui fit faire un tableau représentant le Christ Sauveur, allusion à son nom, entouré de quatre Évangélistes[1]. Dans le bas, deux enfants, d’un coloris frais et gracieux, tiennent le globe du monde ; on y voit encore deux prophètes très estimés.

Après tous ces travaux, éprouvant le besoin de changer d’air, il fut envoyé par le prieur, qui était son ami, dans un de leurs monastères[2], où il exécuta, pour le salut de son âme et le profit de l’ordre plusieurs peintures de piété relatives à la contemplation de la mort. À San Martino de Lucques, il fit une Madone ayant à ses côtés saint Etienne et saint Jean et à ses pieds un petit ange qui joue du luth, d’un dessin et d’un coloris parfaits[3]. Pareillement, à San Romano, il fit une peinture sur toile représentant une Madone de la Miséricorde, placée sur un piédestal, avec des anges soutenant son manteau[4]. Cette œuvre est regardée comme la plus parfaite qu’il ait produite. Dans la même église, il y a de lui une toile où sont figurés le Christ, sainte Catherine martyre et une sainte Catherine de Sienne en extase, dont la beauté est inimitable[5].

À Prato, vis-à vis des prisons, il fit un tableau de l’Assomption[6] et d’autres peintures qui sont dans la maison des Médicis ou ailleurs. Dans celle de Pier del Pugliese, appartenant aujourd’hui à Matteo Bottit citoyen et marchand florentin, il fit, au sommet d’un escalier, dans un vestibule, saint Georges à cheval terrassant le serpent[7]. Cette peinture est à l’huile et en clair-obscur ; il préparait ainsi ses ouvrages en guise de cartons et les ombrait aussi à l’encre ou avec du bitume. Nous en avons la preuve dans plusieurs de ses tableaux restés inachevés à sa mort, et dans quantité de dessins faits de la même manière, dont la plus grande partie se trouve dans le monastère de Santa Caterina[8], sur la place San Marco chez une religieuse qui s’occupe de peinture[9]. Il avait l’habitude, quand il travaillait, d’avoir l’objet vivant sous les

  1. Tableau payé 100 ducats d’or. Le milieu est au palais Pitti, les deux prophètes sont aux Offices. 1516. Signé, daté MDXVI.
  2. À la Maddalena in pian di Mugnone.
  3. En place, signé : FRIS. BARTHOL. FLORENTINI. OPVS. 1509.
  4. Peinte en 1515.
  5. Les deux tableaux de San Romano sont à la Pinacothèque de Lucques.
  6. Au Musée de Naples, 1516.
  7. N’existe plus.
  8. Actuellement Académie des Beaux-Arts.
  9. Sœur Plautina Nelli.