Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/113

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lorsque le cardinal fut appelé à Rome pour ses affaires ; celui-ci emmena Giuliano avec lui, laissant de nombreux ouvriers formés par l’architecte, qui devaient terminer la construction d’après ses dessins. Giuliano revint volontiers à Rome, pour revoir son frère et ses travaux ; il y resta quelques mois ; mais le cardinal, étant tombé en disgrâce, s’enfuit dans la crainte d’être emprisonné, et Giuliano l’accompagna. Arrivés à Savone, ils augmentèrent encore le nombre des ouvriers et des maîtres maçons ; mais les plaintes du pape contre le cardinal se faisant de plus en plus vives, celui-ci se retira à Avignon, et fit présent au roi de France du modèle que Giuliano avait fait d’un palais merveilleux pour la beauté et la richesse des ornements, et assez grand pour contenir toute la cour. Le roi était à Lyon avec toute sa cour quand Giuliano lui présenta ce modèle, et il en fut si enchanté qu’il récompensa largement son auteur et témoigna sa reconnaissance au cardinal qui était resté à Avignon.

Sur ces entrefaites, le cardinal apprit que son palais de Savone était près d’être achevé ; il envoya Giuliano revoir cet ouvrage, qui, peu de temps après son arrivée, se trouva complètement terminé. Comme Giuliano désirait retourner à Florence, où il n’avait pas été depuis longtemps, il se dirigea vers cette ville avec ses ouvriers. Le roi de France venait de rendre la liberté à la ville de Pise mais la guerre continuait encore entre les Florentins et les Pisans. Giuliano, voulant traverser leur territoire, se fit établir un sauf-conduit à Lucques, car il se méfiait fort des soldats pisans. Près d’Altopascio, ils le firent prisonnier avec toute sa suite[1], sans tenir aucun compte du sauf-conduit, et il fut détenu six mois à Pise, d’où il ne put partir qu’après avoir payé une rançon de 300 ducats. Antonio avait appris ces événements à Rome et, désireux de revoir sa patrie et son frère, il prit congé du pape. En route, il donna au duc de Valentinois le dessin de la forteresse de Montefiascone[2]. Enfin, il arriva à Florence en 1503, et les deux frères se revirent avec grande joie, ainsi que leurs amis.

Survint la mort d’Alexandre VI et l’élection de Pie III, qui vécut peu de temps. Enfin le cardinal de San Pietro in Vincola fut élu pape sous le nom de Jules II, ce qui causa une grande joie à Giuliano qui avait été attaché si longtemps à sa personne. Il se décida d’aller à Rome baiser les pieds de Sa Sainteté[3] ; bien accueilli, il fut chargé de la

  1. Cet événement se passa en 1497.
  2. Actuellement en ruines.
  3. Après 1504, parce que jusqu’à cette date il est signalé comme travaillant à Florence.