Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/265

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quelquefois et y souper comme passe-temps. Jules, connaissant la volonté du marquis, ayant vu le tout et levé le plan du site, mit la main à l’œuvre, et conservant les vieilles murailles, fit en partie plus grande la première salle que l’on voit aujourd’hui en entrant, avec la suite d’appartements des’deux côtés. Comme il ne se trouvait ni carrières, ni pierres dures en ce lieu, il se servit de briques recouvertes de stuc pour former les colonnes, les chapiteaux, les corniches, les portes, les fenêtres et tous les autres ornements de cet édifice, composés avec une manière nouvelle et originale. C’est ce qui fut cause que, abandonnant ce projet initial restreint, le marquis se décida à faire le grand palais actuel, dont Jules présenta un admirable modèle et qu’il acheva en peu de temps, avec l’aide de plusieurs maîtres. Cet édifice est carré et renferme intérieurement une cour découverte, en guise de pré ou de place, coupée en croix par quatre entrées, dont la première donne accès dans une grande loggia ouverte sur le jardin ; deux autres ouvrent des appartements et sont ornées de stucs et de peintures. Dans la première salle, dont la voûte est divisée en riches compartiments ornés de fresques, Jules fit peindre sur les murailles par Benedetto Pagni et Rinaldo de Mantoue, ses élèves, les chiens[1] et les chevaux favoris du duc, qu’il avait dessinés lui-même et dont on lit les noms. On passe ensuite dans une autre salle qui forme le coin du palais, et sur la voûte de laquelle sont représentées les Noces de Psyché. Toutes ces fresques ont été peintes par les élèves de Jules, qui, à la manière de Raphaël, les retoucha ensuite. De la chambre de Psyché, on passe dans une salle ornée d’une frise à deux rangs, l’un sur l’autre, travaillée en stuc, sur les dessins de Jules Romain, par Francesco Primaticcio de Bologne et Giovambatista de Mantoue ; c’est une imitation des bas-reliefs de la colonne Trajane. Dans le vestibule, on trouve les douze mois de l’année et l’histoire d’Icare. En sortant de la loggia, on trouve une chambre circulaire dans laquelle Jules s’attacha, par la peinture et l’architecture, à donner la plus grande illusion possible à ceux qui devaient la voir. Sur de solides fondations jetées dans un terrain marécageux, il fit faire une muraille qui, en s’élevant, décrivait un cercle et composait une voûte surbaissée en manière de four ; les fragments de rochers dont étaient formées les portes, les fenêtres et la cheminée, se trouvaient disposés de telle sorte qu’ils semblaient près de s’écrouler. Jules y peignit ensuite les géants foudroyés par Jupiter, sujet d’une conception aussi neuve que hardie.

  1. Il n’y a pas de chiens peints dans cette salle.