Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/298

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ils répondirent que ce serait un présent de trop grand prix. Alors le cardinal leur dit : « On enverra à Sa Majesté celui-là, ou un autre complètement semblable. » Résolu à faire exécuter une copie de cet antique, Jules de Médicis pensa à Baccio et lui fit demander[1] s’il se sentait le courage de faire un Laocoon semblable à l’original. Baccio répondit qu’au lieu d’en faire un pareil, il espérait que son œuvre dépasserait l’autre en perfection. Le cardinal étant donc décidé, et pendant qu’on faisait venir les marbres nécessaires, Baccio fit un modèle en cire qui fut très admiré, et un carton au charbon rehaussé de céruse de la grandeur de l’original. Les marbres arrivés, il se fit construire un atelier au Belvédère, y commença le plus grand des enfants de Laocoon et le termina de manière que le pape et tous ceux qui s’y entendaient en furent satisfaits, parce qu’on ne distinguait, pour ainsi dire, aucune différence entre le marbre antique et le sien. Ayant mis la main à l’autre enfant, et à la statue du père qui est entre les deux, il ne les avait pas beaucoup avancés quand le pape mourut. Après l’élection d’Adrien VI, Baccio retourna à Florence avec le cardinal. Clément VII, qui succéda à Adrien, le fit venir en poste à son couronnement, pour lequel Baccio fit plusieurs statues en bas-reliefs. Ayant ensuite reçu du pape un logement et une pension, il se remit à son Laocoon qu’il termina en deux ans, avec plus de succès qu’il n’en eut d’aucune autre œuvre. Il restaura l’original, auquel manquait le bras droit qu’on ne retrouva pas, et il en fit un en cire, conforme aux muscles et en harmonie avec la fierté de l’ensemble ; il s’en servit pour compléter sa copie. Le groupe de Baccio plut tellement à Sa Sainteté, qu’elle changea d’avis et l’envoya à Florence[2], tandis qu’elle envoyait quelques statues antiques à François Ier. Baccio, que cet ouvrage mit en grande réputation, dessina ensuite, pour la grande chapelle de San Lorenzo, à Florence, le Martyre de saint Cosme et de saint Damien, et celui de saint Laurent, condamné par Décius à mourir sur un gril. Puis il retourna à Florence où il trouva Giovanfrancesco Rustici, son premier maître, occupé à peindre la Conversion de saint Paul. Pour lutter avec lui, il fit un carton représentant une figure nue de saint Jean dans le désert, qui élève la main droite vers le ciel et tient de l’autre un agneau. Il en fit ensuite un tableau à l’huile, qu’il exposa dans la boutique de son père[3]. Les artistes en admirèrent le

  1. Le 21 septembre 1520, pour 900 ducats d’or (papiers de Bandinelli, aux Archives de Florence).
  2. Actuellement aux Offices.
  3. Tableau perdu.