Page:Les vies des plus excellents peintres, sculpteurs, et architectes 02.djvu/309

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grands honneurs, entrer au service de la république. S’en étant excusé, en disant qu’il ne pouvait alors le faire, parce qu’il avait des obligations envers Sa Sainteté, il promit de le faire plus tard et il se sépara d’eux. Mais il ne se passa pas beaucoup de temps (tels furent les efforts des Vénitiens pour l’attirer à eux), qu’il dût quitter Rome, avec le parfait contentement de Sa Sainteté, qu’il satisfît d’abord, dans toutes ses obligations, et il alla servir les illustres seigneurs de Venise, ses maîtres naturels. Il donna bientôt une preuve de son jugement et de son savoir-faire, en bâtissant à Vérone, malgré les nombreuses difficultés que l’entreprise semblait présenter, un superbe et solide bastion qui plut infiniment à la Seigneurie et au duc d’Urbin, capitaine général de la république. Le gouvernement vénitien, ayant ensuite décidé que l’on fortifierait Legnago et Porto, positions très importantes séparées l’une de l’autre par l’Adige, mais réunies par un pont, Sanmichele fit un modèle qui fut universellement approuvé et que l’on mit à exécution. Il fortifia ensuite, presque depuis les fondations, dans le pays brescian, Orzinuovo[1], bourg et port semblable à Legnago.

Comme Francesco Sforza, dernier duc de Milan, le demandait avec instance aux Vénitiens, ceux-ci lui permirent de s’absenter, mais trois mois seulement. Il alla donc à Milan, inspecta toutes les forteresses de cet État, indiqua tous les travaux qui lui paraissaient nécessaires, et, en un mot, contenta le duc à un tel point que, en remerciant la Seigneurie, ce seigneur donna à Michele cinq cents écus. À cette occasion, avant de regagner Venise, Michele se rendit à Casale di Montferrato, pour voir cette place très belle et très forte, que son cousin Matteo Sanmichele, excellent architecte, venait de construire, de même qu’un magnifique tombeau en marbre[2], dans l’église San Francesco de la même ville. À peine fut-il de retour à Venise qu’il fut envoyé avec le duc d’Urbin, pour visiter la Chiusa, forteresse et passage important, situé au-dessus de Vérone, et de plus toutes les places du Frioul, Bergame, Vicence, Peschiera et autres endroits, sur lesquels il fournit un rapport minutieux, ainsi que sur ce qui leur manquait. Ayant été ensuite envoyé en Dalmatie, pour fortifier les places de cette province, il examina et répara avec un soin extrême les anciennes fortifications sur les points qui le nécessitaient le plus. Comme il ne pouvait suffire à tout, il confia à son neveu Giangirolamo, qui avait déjà parfaitement fortifié Zara, le soin d’élever la merveilleuse citadelle de San Niccolo, à

  1. Les fortifications ont en été récemment détruites.
  2. Tombeau de Maria, marquise de Montferrat ; n’existe plus.