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l’entrée du port de Sebenico. Michele, cependant, ayant été envoyé en toute hâte à Corfou, en restaura les fortifications, ainsi que celles de Chypre et de Candie. À peu de temps de là, il fut obligé de retourner dans cette dernière île, que les Vénitiens craignaient de voir enlever par les Turcs. Il fortifia alors, avec une célérité incroyable, la Canée, Candie, Retino et Sitia, mais particulièrement les deux premières, qu’il construisit de fond en comble et qu’il rendit inexpugnables.

Comme la ville de Napoli de Romanie était assiégée par les Turcs, les travaux que Sanmichele y exécuta, ainsi que la valeur d’Agostino Clusoni, capitaine véronais, firent échouer tous les efforts des assiégeants. La guerre terminée, le magnifique Messer Tommaso Mozzenigo, capitaine général de mer, emmena Michele à Corfou que l’on fortifia de nouveau, et à Sebenico, où Giangirolamo reçut de grands éloges pour l’habileté qu’il avait déployée dans la construction de la citadelle de San Niccolo.

De retour à Venise, Sanmichele fut magnifiquement reçu pour les services qu’il avait rendus à la république dans le Levant, et on le chargea d’élever, à l’entrée du port, la forteresse du Lido[1]. Sur des fondations considérables, il éleva une terrible et merveilleuse forteresse, qu’il construisit en bossages et avec des pierres d’Istrie, qui, par leur extrême dureté, résistent aux vents, à la gelée et à toutes les intempéries des saisons. Par sa position, sa beauté et la richesse de l’appareil, c’est une des plus étonnantes qu’il y ait aujourd’hui en Europe. Peu de temps après, il répara et augmenta les fortifications de Marano, qui était retombée au pouvoir de Venise. La réputation de Michele et de son neveu Giangirolamo s’étendit au point que l’empereur Charles-Quint et François 1er, roi de France, essayèrent plusieurs fois de se les attacher ; mais les deux architectes ne voulurent jamais abandonner leur propre gouvernement pour aller servir des étrangers.

Michele travailla surtout à fortifier et à embellir Vérone, sa patrie. Il fit, entre autres choses, les magnifiques portes qui n’ont point leurs pareilles au monde. Ayant débuté par la Porta Nuova[2], qui conduit à la forteresse, il éleva, quelques années après, celle del Palio[3], qui n’est pas inférieure à la première en beauté. On lui doit encore la Porta di San Zeno ; elle est très belle, et, dans toute autre ville, passerait pour une merveille ; mais à Vérone, elle est complètement

  1. Sant’Andrea du Lido ; terminée en 1544. Existe encore.
  2. Datée 1533.
  3. Construite de 1542 à 1557.