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Voyages Aduentureux

eſtoit poſſible, la perte qu’ils auoient faite, & d’vſer du droit de repreſailles ſur toutes les marchandiſes qu’ils treuueroient eſtre du Royaume de Pan, iuſqu’à la concurrence de la ſomme qui leur auoit eſté volée ; le Roy les ayant oüis en leur plainte, & leur accordant à l’inſtant ce qu’ils demandoient ; Il eſt raiſonnable, leur diſt-il, que vous faſſiez comme l’on vous a fait, & que vous voliez ceux qui premierement vous ont volez, principalement en vne choſe qui appartient au Capitaine de Malaca, à qui tous vous autres eſtes ſi fort obligez. Les Portugais l’ayant remercié de cette faueur, s’en retournerent en leurs maiſons, où ils conclurent de ſe ſaiſir de tout ce qu’ils treuueroient eſtre du Royaume de Pan, iuſqu’à ce qu’ils euſſent entierement recouuré leur perte. Il arriua donc neuf iours apres, qu’eſtants aduertis qu’à dix-huict lieuës de là, ſur la riuiere de Calantan, il y auoit trois Iuncos de la Chine grandement riches, & qui appartenoient à des marchands Mahumetans, natifs du Royaume de Pan, qu’vne fortune de mer auoit contraint de ſe ſauuer en ce lieu, nos gens ſe reſolurent de s’en aller fondre ſur eux. Pour cet effet de trois cens Portugais, qui pour lors eſtoient en ce païs, nous en choiſiſmes quatre vingts, auec leſquels nous nous embarquaſmes en deux Fuſtes, & dans vn Nauire rond, bien fournis de toutes les choſes que nous iugeaſmes eſtre neceſſaires à cette entreprise ; ainſi nous partiſmes trois iours apres auec diligence, de peur qu’eſtans découuerts par les Mahumetans du pays, ils n’en donnaſſent aduis à ceux que nous allions chercher. De ces trois vaiſſeaux eſtoit General vn Ioan Fernandez Dabreu, natif de Madere, & fils du pere nourricier du Roy Dom Ioan. Ceſtuy cy eſtoit dans le Nauire rond auec quarante ſoldats, & dans les autres deux Fuſtes commandoit Laurens de Goes, & Vaſco Sermento ſon couſin, tous deux natifs en Portugal, de la ville de Bragance, & grandement experimentez en la Milice nauale. Le iour d’apres nos vaiſſeaux arriuerent à la riuiere de Calentan ; là nous ne viſmes pas plutoſt à l’ancre les trois Iuncos, deſquels l’on nous auoit donné aduis, que nous les attaquaſmes fort vaillamment, & bien que ceux qui eſtoient