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de Fernand Mendez Pinto.

il nous appella prés de luy, & fiſt ſigne au Truchement qui eſtoit vn peu plus eſloigné, qu’il euſt à nous dire ces mots de ſa part, Mes bons amis, ie vous prie d’ouyr cette lettre que m’enuoye le Roy de Bungo, mon Seigneur & oncle, & ie vous diray par apres ce que ie deſire de vous. Alors l’ayant donnée à vn ſien Threſorier, il luy commanda de la lire ; ce qu’il fiſt à l’inſtant, & ces paroles s’y trouuerent eſcrites. Œil droit de mon viſage qui eſt aßis à mon coſté, comme chacun de mes fauoris Hyaſcarangoxo Nautaquin de Tanixumaa, moy Orgemdoo qui ſuis voſtre pere en l’amour veritable de mes entrailles, comme celuy de qui vous auez prix le nom & l’eſtre de voſtre perſonne, Roy de Bungo & Facataa, Seigneur de la grande Maiſon de Fiancima, Toſa & Bandou, Chef ſouuerain des petits Roys des Iſles de Goto & de Xamanaxeque, ie vous fais ſçauoir, mon fils, par les paroles de ma bouche, qui ſont dites de voſtre perſonne, que les iours paſſez des hommes venus de cette contrée m’ont aſſeuré que vous auez en voſtre ville trois Chenchicogins du bout du monde, gens qui s’accommodent fort bien auec ceux du Iappon, qui vont veſtus de ſoye, & portent ordinairement l’eſpée au coſté, non comme marchands qui exercent le commerce, mais en qualité de perſonnes qui font profeſſion d’honneur, & qui parce ſeul moyen pretendent rendre leurs noms immortels. Au reſte i’ay appris au vray que ces hommes-la, vous ont entretenu fort amplement de toutes les choſes de l’Vniuers, & vous ont affirmé par leur verité qu’il y a vn autre mõde plus grand que le noſtre, peuplé de gens noirs & bazanez, deſquels ils vous ont conté des choſes qui ſont incroyables à noſtre iugement, à cauſe dequoy ie vous prie infiniment comme ſi vous eſtiez mon fils, que par Fingecandono à qui i’enuoye viſiter ma fille, vous me mandiez vn de ces trois Eſtrangers qu’on m’a dit que vous auiez en voſtre maiſon ; puis que comme vous ſçauez ma longue indiſpoſition accompagnée de douleurs, de triſteſſes & de grands ennuis a beſoin de diuertiſſement. Que ſi de hazard ils y viennẽt à contre-cœur, en tel cas vous le pourrez aſſeurer, tant par voſtre verité, que par la mienne, que ie ne tarderay gueres à les renuoyer en toute ſeureté. Cela eſtant, comme vn vray fils qui deſire ſe rendre agreable à ſon pere, faites en ſorte que ie me reſiouiſſe par leur veuë, & que de ce coſté la mon deſir ſoit accomply. Ce que i’ay a vous dire de ſurplus vous l’ap-