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de Fernand Mendez Pinto.

ne ſeruiroit neantmoins qu’à entretenir la melancholie du malade, au lieu de la diuertir. Là deſſus s’eſtant mis à railler auec les ſiens, en termes pleins de galanterie, & de mots pour rire ; à quoy les peuples du Iappon ſont fort enclins ; le Fingeandono arriua auquel il me donna, & me recommanda à luy en termes exprés touchant l’aſſeurance de ma perſonne, dequoy ie me tins pour grandement ſatiſfait, & m’oſtay dés lors de la fantaiſie certains ſoupçons que ie m’y eſtois mis, pour le peu de cognoiſſance que i’auois de l’humeur de ces gens là. Cela fait le Nautaquin commanda qu’on me donnaſt deux cens Taels pour mon voyage, dont ie me ſeruis à faire mes preparatifs le pluſtoſt qu’il me fût poſſible ; ces choſes ainſi peſées, le Fingeandono & moy nous miſmes dans vn vaiſſeau de rame qu’ils appellent Funce, & dans vne ſeule nuit ayant trauerſé toute cette Iſle de Tanixumaa, au matin nous allaſmes moüiller l’ancre en vn havre nommé Hiamangoo, & de là nous en allaſmes en vne bonne ville qui s’appelloit Quanquixumaa, d’où continuant noſtre route auec le vent en poupe, & vn temps bonaſſe, nous arriuaſmes le iour d’apres en vn fort beau lieu nommé Tanora, d’où le lẽdemain nous fuſmes coucher à Minato, & de là à Fiungaa. Ainſi mettant pied à terre à chaque iour, ſans oublier à nous pouruoir de bõs rafraiſchiſſements, nous arriuaſmes à vne fortereſſe du Roy de Bungo, appellée Oſquy, à ſix lieuës de la ville. En ce lieu le Fingeandono s’arreſta quelques iours, à cauſe que le Capitaine de cette place (qui eſtoit ſon beau-frere) ſe trouuoit fort indiſpoſé. Là meſme nous laiſſaſmes le vaiſſeau dans lequel nous eſtions venus, & nous en allaſmes par terre droit à la ville. Y eſtans arriuez ſur le midy, pource que ce temps n’eſtoit pas propre à parler au Roy, le Fingeandono s’en alla deſcendre en ſa maiſon, où il fut grandement bien receu de ſa femme & de ſes enfans, qui me firent auſſi vn fort bon accueil. Apres le diſner comme il eut vn peu repoſé il priſt vn habillemẽt de parade, & accompagné de quelques ſiens parens, il s’en alla à cheual au Palais du Roy, où il me mena auec luy. Le Roy ne fut pas pluſtoſt aduerty de ſa venuë, qu’il l’enuoya receuoir à la baſſecour par vn ſien fils aagé de neuf ou dix ans, lequel accompa-