Page:Les voyages au théâtre par A. D'Ennery et Jules Verne.djvu/65

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Suivent les musiciens jouant du tambour, des cymbales, et soufflant dans de longues trompes hébraïques, longues de deux mètres.

Groupe de bayadères, dansant, précédant une divinité indoue portée par quatre porteurs. Second groupe de bayadères qui entourent la statue de la déesse Kali. Les unes l’éventent avec de grands éventails de plumes de paon, tandis que les autres agitent en tous sens des banderolles et des houppes touffues fabriquées avec des queues de moutons du Thibet.

La déesse Kali, déesse de l’amour et de la mort, a quatre bras, le corps colorié d’un rouge sombre, les yeux hagards, la chevelure emmêlée, la langue pendante, les lèvres teintes de henné et de bétel. À son cou s’enroule un collier de têtes de mort. À ses flancs, une ceinture de mains coupées. Elle se tient debout sur un géant terrassé, auquel la tête manque.

La statue est rangée au fond. Apparaît alors un éléphant conduit par le Parsi, portant une sorte de petite pagode sur le dos, dans laquelle est couchée Aouda.

Danses, chants, etc., etc. Le cortège est fermé par des gardes ayant le sabre nu passé à la ceinture et de longs pistolets damasquinés.

Aouda, descendue par des brahmanes est revêtue d’une tunique lamée d’or.

Lorsque les brahmanes s’approchent d’elle pour l’envelopper d’une toile de mousseline, elle les repousse d’abord.)

LE BRAHMANE.

Tu as promis de mourir sans faiblesse et la tête haute.

AOUDA.

C’est ainsi que je mourrai, puisque Nakahira est libre. (Se dépouillant de ses bracelets, de ses bagues et de ses colliers et les jetant aux bayadéres qui dansent autour d’elle.) Servantes de Brahma, partagez-vous ces dépouilles. (Les bayadères lui mettent un voile. Le brahmane la mène au bûcher. — Elle y monte en levant les yeux vers le ciel.)

AOUDA.

Dieu puissant, reçois mon âme. (Des brahmanes s’approchent pour allumer le bûcher.)

FOGG, avec force.

Non, non, cela ne sera pas. (Tout le monde se retourne, étonné.)

FOGG.

Cet odieux sacrifice ne s’accomplira pas devant un Anglais !

ARCHIBALD.

Ni devant un Américain !

LE BRAHMANE.

Des étrangers ?…

TOUS, se précipitant sur Fogg.

Des étrangers ?

UNE VOIX, du haut du bûcher.

Arrêtez !