Page:Lesage - Histoire de Gil Blas de Santillane, 1920, tome 1.djvu/5

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ments ; c’est une suite de faits nécessaires, ornés de courtes réflexions nées du sujet : ce sont partout des peintures vraies et des caractères qu’on retrouve parmi les hommes : M. Le Sage ne transporte pas ses lecteurs dans un monde idéal ; il les divertit enfin pour les instruire. »


Voltaire, dans la liste d’écrivains qu’il mit en tête de son Siècle de Louis XIV, se borna, pour l’article Le Sage, aux quelques lignes suivantes :


« Le Sage, né à Vannes, en Basse-Bretagne, en 1667 (lisez 1668). Son roman de Gil Blas est demeuré, parce qu’il y a du naturel ; il est entièrement pris du roman espagnol intitulé : La Vida del escudero don Marcos de Obrego. Mort en 1747. »


L’assertion de Voltaire est inexacte, et l’éloge est réduit au minimum. On s’expliquerait peu cette sévérité et cette malveillance, si l’on n’avait lu le chapitre où Gil Blas, pendant son séjour à Valence, voit jouer une tragédie nouvelle du poète à la mode, don Gabriel Triaquero. Ce chapitre de Le Sage est tout satirique et à l’adresse de Voltaire, qui est évidemment don Gabriel. Le Sage était un classique du dix-septième siècle, peu favorable aux nouveautés et probablement il avait, un jour ou l’autre, rencontré le jeune auteur d’Œdipe, dans la première ivresse de son succès ; lui, le plus simple des gens d’esprit, il l’avait trouvé un peu fat et pas assez bon enfant. Voltaire, à son tour, retrouvant Le Sage sur son chemin, prit sa revanche de la satire par un éloge épigrammatique et une assertion mensongère.

Autour de Voltaire, on devait peu louer Le Sage.