Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/291

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pagnie. « Hélas ! disait-il à Chatte blanche, que j’aurai de douleur de vous quitter ! je vous aime si chèrement ! Ou devenez fille, ou rendez-moi chat. » Elle trouvait son souhait fort plaisant, et ne lui faisait que des réponses obscures, où il ne comprenait presque rien.

Une année s’écoule bien vite quand on n’a ni souci ni peine, qu’on se réjouit et qu’on se porte bien. Chatte blanche savait le temps où il devait retourner, et, comme il n’y pensait plus, elle l’en fit souvenir. « Sais-tu, dit-elle, que tu n’as que trois jours pour chercher le petit chien que le roi ton père souhaite, et que tes frères en ont trouvé de fort beaux ? » Le prince revint à lui, et, s’étonnant de sa négligence : « Par quel charme secret, s’écria-t-il, ai-je oublié la chose du monde qui m’est la plus importante ? Il y va de ma gloire et de ma fortune. Où prendrai-je un chien tel qu’il le faut pour gagner le royaume, et un cheval assez diligent pour faire tant de chemin ? » Il commença de s’inquiéter et s’affligea beaucoup.

Chatte blanche lui dit, en s’adoucissant : « Fils de roi, ne te chagrine point, je suis de tes amies ; tu peux rester encore ici un jour ; et, quoiqu’il y ait cinq cents lieues d’ici à ton pays, le bon cheval de bois t’y portera en moins de douze heures. — Je vous remercie, belle chatte, dit le prince ; mais il ne me suffit pas de retourner vers mon père, il faut que je lui porte un petit chien. — Tiens, lui dit Chatte blanche, voici un gland où il y en a un plus beau que la Canicule. — Ho ! dit le prince, madame la chatte, Votre Majesté se moque de moi. — Approche le gland de ton oreille, continua-t-elle, et tu l’entendras japper. » Il obéit ; aussitôt le petit chien fit jap, jap, dont le prince demeura transporté