Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/365

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la résolution de m’en rendre aussi digne qu’il me serait possible.

« Je ne voulus pas me faire voir en arrivant où était la cour.

« Je connus bientôt ce que c’était que le génie du bon calife. Je fus informé du caractère de son premier ministre. Comme il n’avait pas la capacité qu’ont d’ordinaire ou que doivent avoir ceux qui gouvernent sous leur maître, il n’avait pas aussi leur présomption, et moins encore leur rudesse ; c’était le ministre le plus affable qui fut jamais. Il avait une femme qui n’était pas si simple, mais qui était encore plus accueillante. Je me mis à son service en qualité d’écuyer, et je m’aperçus bientôt que je ne déplaisais pas à madame la sénéchale. — Quelle sorte de beauté était-ce ? dit Fleur d’Épine en l’interrompant. — De celles qui la font comme il leur plaît, » répondit-il. Et, continuant son discours : « Comme le sénéchal son époux était tout des plus grossiers, je n’eus pas de peine à passer pour fort habile dans son esprit ; cela fit qu’on se servit de moi pour chercher un remède aux maux que faisaient chaque jour les yeux de la princesse. »

Tarare alors lui conta de quelle manière il était venu à bout de la peindre. « Vous l’avez donc souvent regardée ? dit Fleur d’Épine ? — Oui, dit-il, tout autant que j’ai voulu, et sans aucun danger, comme je viens de vous dire. — L’avez-vous trouvée si merveilleusement belle qu’on vous avait dit ? poursuivit-elle. — Plus belle mille fois, répondit-il. — On n’a que faire de vous demander, ajouta-t-elle, si vous en êtes d’abord devenu passionnément amoureux ; mais dites-m’en la vérité. »

Tarare ne lui cacha rien de ce qui s’était passé entre lui et la princesse, pas même l’assurance qu’elle lui avait don-