Page:Lescure - Le Monde enchanté.djvu/481

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chantes fées, condamnées à remplir ces postes pendant plusieurs siècles, selon la qualité de leurs crimes.

Dès qu’elles aperçurent la fée, elles la saluèrent en laissant tomber leurs massues sur le pavé ; comme il était pareillement d’acier, il rendit un son éclatant et fit feu. Cet honneur était dû à toutes celles qui, ainsi que la fée, avaient un gouvernement.

Après avoir monté l’escalier, composé de porphyre, de jaspe, d’agate et de lapis, elle aperçut dans la première chambre douze jeunes filles simplement vêtues, mais sans chaperon ; elles avaient seulement le clavier à la ceinture, et la demi-baguette dont elles la saluèrent comme avaient fait les gines. Elle leur rendit le salut ; car cet emploi est ordinairement destiné à celles qui devaient être bientôt initiées à l’art de féerie. Elle traversa une longue suite d’appartements magnifiquement meublés, et arriva dans l’antichambre de la reine, qu’elle trouva remplie de fées qui s’y étaient rendues de toutes les parties du monde, les unes pour leurs affaires, et les autres pour faire leur cour.

Il n’y avait presque plus personne dans le cabinet de la reine, lorsqu’elle en vit sortir la vieille Gangan. Sans le respect que les fées ont pour leur souveraine, elle n’aurait pu s’empêcher d’éclater de rire à la vue d’une figure aussi grotesque que celle de Gangan. Sur un corps de robe de satin vert chamarré de dentelles bleues et or, elle portait un large vertugadin de même étoffe, brodé de chenille et de pompons couleur de rose ; d’un demi-ceint enrichi d’émeraudes pendaient à un clavier d’argent un petit miroir en boîte à mouches, une grosse montre et un étui de pièces ; ses oreilles étaient chargées de deux grosses pendeloques de