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à force d’aimer

l’heure, pourvu que cette femme affolée n’appuyât pas sur la détente.

— « Je vous donne une minute, » dit Hélène. « Et, si vous faites un seul pas vers moi, je tire. »

Elle avait prévu qu’il tenterait de se jeter sur elle et de la désarmer. Mais la distance entre eux était assez grande pour qu’il ne pût agir par surprise. D’ailleurs il l’agrandit encore, marchant à reculons. Tout près de la porte, il s’enhardit, haussa les épaules avec un sourire engageant. Même il risqua quelques mots :

— « Voyons, Hélène, abaissez cette arme. Je vous jure de me retirer. Nous ne pouvons pas nous quitter ainsi. »

Car il enrageait d’être réduit à avoir peur et à le montrer. Malgré la douceur de ses intonations, il sentait monter en lui une haine furieuse contre son ancienne maîtresse, à cause de l’humiliation qu’elle lui infligeait.

— « Trente-sept… trente-huit… trente-neuf… quarante… » articula lentement Hélène.

Elle avait compté tout bas les secondes de la minute accordée. Maintenant elle poursuivait tout haut.

Édouard mit la main sur le bouton de la porte.

— « Adieu, » dit-il. « Mais tant pis pour vous et pour votre enfant !…

— Quarante-quatre… quarante-cinq… » énonça Hélène.