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Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/170

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à force d’aimer

Vallery sut-il que son meilleur ami et sa femme le trompaient ensemble ? Des gens bien informés le certifièrent. C’était le moment où le banquier lançait sa fameuse affaire du Tunnel sous la Manche. Il avait plus besoin que jamais de Maurice, qui, ayant acquis une réelle influence à la Chambre, devait lui obtenir l’autorisation d’une émission de valeurs à lots et la garantie de l’État. D’autre part, si un éclat survenait entre lui et Clotilde, si la jeune femme provoquait le divorce, dont elle avait toujours la menace à la bouche, qu’adviendrait-il de la maison de banque ? Ils étaient mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts. Le paiement immédiat de la dot et de la moitié des bénéfices réalisés depuis dix ans détruirait la situation financière de Vallery. Malgré l’audace de sa femme, qui s’affichait — contre le gré de Maurice — et qui poursuivait son amant jusque dans les couloirs du Palais-Bourbon, Édouard Vallery garda la physionomie sereine, et autour de Clotilde, en public, la grâce souriante, les empressements d’un mari heureux.

Il ne se départit pas de cette attitude, même lorsque les aventures de sa femme se compliquèrent. Clotilde, bientôt, trompa Maurice comme elle avait trompé Édouard. L’amant assuma le rôle de mari tragique, ce rôle que Vallery s’était gardé de prendre. Il menaça de tout massacrer.