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à force d’aimer

des satisfaits montrait le poing et qu’acclamaient les multitudes souffrantes. C’était Horace Fortier, l’auteur de L’État pour le Peuple ou le Peuple pour l’État, le directeur de L’Avenir social.

— « Mon cher enfant, » dit-il d’une voix mordante, « si les riches poupées et les amusettes te font oublier nos travaux, laisse-moi poursuivre mon œuvre tout seul. Mais alors, quitte-moi. N’ajoute pas, à mes luttes, certaines préoccupations, certaines amertumes… Tu es un homme, tu as une carrière, puisque tu es docteur en droit, et je suis prêt à te rembourser la somme que tu as consacrée aux intérêts de notre parti. »

René Marinval se leva, devenu maintenant très pâle.

— « Mon cher maître, je n’ai pas mérité que vous me parliez ainsi.

— Si !… » reprit durement Horace. « Car je ne juge pas au hasard, et il ne s’agit pas d’aujourd’hui. Regarde en toi-même. Quels rêves, quels espoirs poursuivais-tu près de cette fenêtre ? Vers quelles faiblesses allais-tu glisser ? C’est ma faute, je le sais bien, puisque c’est moi qui t’ai amené ici, qui ai choisi cet appartement. J’ai pensé que ceci » (et son bras tendu désignait le lourd et superbe hôtel, tout blanc parmi les arbres noirs) « serait un enseignement pour toi, un perpétuel scandale qui nourrirait ton âme d’indignation… Malheureux enfant ! ce qu’il a fait naître dans ton cœur, ce