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à force d’aimer

élevait au-dessus de cette population ouvrière dont il était sorti. Mais la « force inconnue » n’allait pas encore jusqu’à aplanir de telles barrières sociales. Jamais le chef d’usine ne donnerait sa fille unique en mariage à ce garçon. Celui-ci en obtenait la certitude ; et alors, pour devenir un personnage politique et conquérir celle qu’il aimait autant qu’il en était aimé, il se faisait le meneur d’une grève générale, dans laquelle il entraînait même les ouvriers de son patron ; il se posait en défenseur des intérêts populaires, et sollicitait un siège de député. Loin de céder, le père de Germaine s’exaspérait, déclarant à sa fille qu’il aimerait mieux fermer son usine que de capituler devant les grévistes, et la tuer elle-même de sa main que de la donner à l’homme qu’elle avait choisi.

Telle était la situation quand le rideau tomba à la fin du deuxième acte.

Cinq minutes après, M. de Percenay, qui était sorti de la loge, y amena René Marinval.

— « Mesdemoiselles, » dit le ministre en rentrant, « voilà l’homme qui veut la réforme de la société par l’amour des belles jeunes filles riches pour les fils du peuple qui parlent bien et qui ont de jolies moustaches. Tenez-vous sur vos gardes ! »

L’aisance avec laquelle il fit cette plaisanterie rendit plus saisissantes, aux yeux observateurs de