Page:Lesueur - À force d'aimer, 1895.djvu/351

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cela, j’espère, » dit René, avec un sourire d’ironie.

— « Détrompez-vous. M. Vallery n’a peut-être pas toutes les graves maladies que lui attribue la complaisance des médecins, mais il est atteint profondément, au moral comme au physique. Si vous l’aviez vu à son départ de Paris, et si vous le revoyiez maintenant, vous ne le reconnaîtriez pas. Il est parti dans la force de l’âge, et, en six mois, il est devenu un vieillard. Ses cheveux et sa barbe ont blanchi, son embonpoint a disparu, ses épaules se sont voûtées. Bien plus, à force de simuler l’état d’un mourant, il a fini par se croire au bord de la tombe. Il montre toutes les manies tyranniques des malades. Aussitôt que Huguette n’est plus enfermée avec lui, comme ce matin, il se lamente, s’emporte, la fait chercher. Vous avez vu, elle n’a pas une minute à elle. Pauvre chérie ! Et elle est si douce, si patiente !… Elle ne supporte pas un mot de blâme contre son père.

— Mais, vous non plus, Germaine. Votre ardeur à défendre la mémoire de M. de Percenay est tout à fait admirable.

— Est-ce par raillerie que vous dites cela ? » prononça la jeune fille, en se tournant pour poser sur lui ses hautains yeux noirs.

— « Ne le croyez pas ! » s’écria vivement René. « Quelle que soit ma pensée sur M. de Percenay, je souhaite que son souvenir reste sacré dans le cœur de sa fille.