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à force d’aimer

Puis, tout bas, avec une timidité qui rendait le mot plus divinement secret et tendre :

— « Oh ! maman… »

Tous deux s’oubliaient. Quand finit cette minute d’extase, quand ils délièrent leur étreinte et regardèrent autour d’eux, Édouard Vallery avait disparu. Était-ce un excès d’émotion ou un excès d’indifférence qu’il avait voulu leur cacher ? Ni la mère ni le fils ne s’en soucièrent. Tout à la joie de se posséder, de s’adorer, de se donner mille noms de douceur, ils ne parlèrent même pas de lui. Le petit voulut dormir cette nuit-là dans le grand lit de sa maman. Mais, tout en serrant contre elle ce corps gracieux, cette chair de sa chair, qui lui paraissait deux fois plus à elle maintenant, Hélène dit à l’oreille de son fils :

— « Il faut continuer à m’appeler « ma tante », pendant quelques jours, mon chéri. Je te dirai pourquoi plus tard. Mais bientôt nous quitterons Paris, nous irons demeurer ailleurs, et alors tu me diras « maman ».

— Pour toujours ?

— Oui, pour toujours, mon bien-aimé. »

Encore quelques câlineries, et déjà l’enfant s’assoupissait. Hélène le contemplait, dans le demi-jour de la veilleuse, tout étonnée de se sentir au cœur une pareille joie après les cruelles secousses de cette soirée. Ah ! il avait bien fait de venir, ce père sans entrailles ! Il avait bien fait de remplir