Page:Lesueur - Le Marquis de Valcor.djvu/23

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implorer leur pardon d’éclater indomptablement. Il y avait une appréhension indicible sur son visage, et en même temps une ferveur filiale qui s’humiliait de cette appréhension, se maudissait de n’y pouvoir résister.

La comtesse de Ferneuse regarda longuement son fils, puis, d’une voix calme :

— « Si elle en a le droit ?… Mais je donnerais ma vie pour le savoir. »

Un inconnu redoutable s’évoqua dans la profondeur de l’accent, d’une indéniable sincérité. Une sensation d’énigme étreignit le jeune de Ferneuse, mais, du même coup, les vils soupçons cessèrent de violenter son cœur de fils.

Il fit le mouvement de s’agenouiller.

— « Oh ! pardon… pardon… mère…

— Y penses-tu !… On peut nous voir.

— Ma mère, j’aurai raison de ceci. Il y a un homme qui m’en rendra compte. »

Elle ne répondit rien et prit son bras.

Tous deux s’éloignèrent.

Couple d’une grâce touchante et haute, cette mère, ce fils, beaux tous deux, lui d’une jeunesse si fraîchement virile, elle d’une si noble féminité, intacts quand même sous l’outrage, et d’une telle confiance l’un dans l’autre.

Leurs deux silhouettes s’effacèrent, à quelque distance, dans les ténèbres.

— « Mon Dieu !… C’est atroce !… » murmura M. de Plesguen, en se levant.

Parlait-il de l’injurieuse expulsion, du supplice de cette femme, à qui, malgré tout, son fils demanderait d’étranges comptes ? du brutal écrasement de l’amour au cœur de deux enfants