Page:Lesueur - Nietzscheenne.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en français. Il ne fut Allemand que par hasard, comme je ne le suis moi-même qu’accidentellement. Les Allemands manquent de doigté pour nous, ils n’ont d’ailleurs pas de doigts du tout, ils ont des pattes. Je ne parle pas de Heine — l’adorable Heine, comme on dit à Paris, — qui a passé depuis longtemps dans la chair et le sang des lyriques parisiens, les plus délicats et les plus précieux. Que ferait le bétail cornu allemand avec les délicatesses d’une pareille nature! Pour ce qui est enfin de Richard Wagner, plus la musique française s’adaptera aux exigences de l’âme moderne, plus elle wagnérisera — elle le fait déjà bien assez ! Il ne faut pas se laisser tromper à cet égard par Wagner, lui-même. Ce fut une mauvaise action de la part de Wagner de se moquer de Paris, pendant son agonie en 1871. En Allemagne, malgré cela, Wagner n’est qu’un malentendu : qui serait par exemple moins capable de comprendre quelque chose à Wagner que le jeune empereur ? Néanmoins pour tout connaisseur du mouvement de la culture en Europe, le fait n’en demeure pas moins certain que le romantisme français et Wagner sont liés étroitement.

(Le Crépuscule des Idoles, p. 83 et 84.)

Loin d’être superficiel, un grand Français n’en a pas moins sa superficie, une enveloppe naturelle qui entoure son fond et sa profondeur, — tandis que la profondeur d’un grand Allemand est généralement tenue enfermée dans une fiole étrangement contournée, comme un élixir qui cherche à se garantir par son enveloppe dure.

(Aurore, p. 217.)

L’Allemand amoncelle autour de lui les formes, les couleurs, les produits et les curiosités de tous les temps et de toutes les zones, et produit ainsi ce modernisme de foire bariolé qu’à leur tour ses savants définissent et analysens comme « ce qu’il y a de moderne en soi », et il demeure tranquillement assis au milieu de ce tumulte de tous les styles. Mais, avec ce genre de <n culture » qui n’est qu’une flegmatique insensibilité à l’égard de la culture, on ne peut pas vaincre des ennemis, du moins des ennemis comme les