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PREMIÈRE PARTIE

voient vous être que très-importuns ? Vous saviez bien que vous ne seriez pas toujours en Portugal, et pourquoi m’y avez-vous voulu choisir pour me rendre si malheureuse ? Vous eussiez trouvé sans doute en ce pays quelque femme qui eût été plus belle, avec laquelle vous eussiez eu autant de plaisirs, puisque vous n’en cherchiez que de grossiers ; qui vous eût fidèlement aimé aussi longtemps qu’elle vous eût vu ; que le temps eût pu consoler de votre absence, et que vous auriez pu quitter sans perfidie et sans cruauté. Ce procédé est bien plus d’un tyran, attaché à persécuter, que d’un amant, qui ne doit penser qu’à plaire. Hélas ! pourquoi exercez-vous tant de rigueur sur un cœur qui est à vous ? Je vois bien que vous êtes aussi facile à vous laisser persuader contre moi, que je l’ai été à me laisser persuader en votre faveur. J’aurois résisté, sans avoir besoin de tout mon amour et sans m’apercevoir que j’eusse rien fait d’extraordinaire, à de plus grandes raisons que ne peuvent être celles qui vous ont obligé à me quitter. Elles m’eussent paru bien foibles, et il n’y en a point qui eussent jamais pu m’arracher d’auprès de vous ; mais vous avez voulu profiter