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Page:Lettres portugaises, éd. Piedagnel, 1876.djvu/44

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LETTRES PORTUGAISES

les suites de ces commencements si agréables, et si heureux ne sont que des larmes, que des soupirs, et qu’une mort funeste, sans que je puisse y aporter aucun remède. Il est vrai que j’ai eu des plaisirs bien surprenans en vous aimant, mais ils me coûtent d’étranges douleurs, et tous les mouvemens, que vous me causez, sont extrêmes. Si j’avois résisté avec opiniâtreté à votre amour ; si je vous avois donné quelque sujet de chagrin, et de jalousie pour vous enflammer davantage ; si vous aviez remarqué quelque ménagement artificieux dans ma conduite ; si j’avois enfin voulu opposer ma raison à l’inclination naturelle que j’ai pour vous, dont vous me fîtes bientôt apercevoir (quoique mes efforts eussent été sans doute inutiles), vous pourriez me punir sévèrement et vous servir de votre pouvoir ; mais vous me parûtes aimable avant que vous m’eussiez dit que vous m’aimiez ; vous me témoignâtes une grande passion ; j’en fus ravie et je m’abandonnai à vous aimer éperdument. Vous n’étiez point aveuglé, comme moi, pourquoi avez-vous donc souffert que je devinsse en l’état où je me trouve ? Qu’est-ce que vous vouliez faire de tous mes emportements, qui ne pou-