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Page:Leury - Histoire de Rouyn.djvu/10

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Le souper était pris, accompagnant les deux policiers, nous fîmes la première ronde dans les sentiers de Rouyn. Puis je me retirai chez M. Dumulon. Je dois un hommage de gratitude tout particulier à cette famille généreuse qui me permit de faire à son foyer mon « chez nous ». Je me rappelle toujours la bonté de madame Bélanger, mère de Mme Dumulon, vénérable septuagénaire, excellente chrétienne, qui s’inquiétait toujours à mon sujet. Je lui donnai l’avantage d’assister à la sainte messe chez elle du jeudi au dimanche. Le vendredi, Mme Peppin une catholique irlandaise, âgée d’environ soixante ans me fit offrir comme chapelle temporaire un camp portant le nom pompeux d’Hôtel Rouyn au coin de la rue Perreault actuelle et exactement à l’endroit ou se trouvat l’hotel Rouanda incendié en 1938. Là il y avait un comptoir de liqueurs douces et on y dansait toute la nuit ; à 5 hrs du matin les habitués s’en allaient, on passait le balai et l’église était prête à recevoir les fidèles. Le dimanche et lundi j’y célébrai la sainte messe. Une grande partie de la population assista à la messe, ces deux jours. Le mardi 17 mars, fête de St-Patrice, la chapelle était remplie à déborder. Plusieurs protestants étaient présents. Je n’oublie pas M. Clarence Huenegard qui assistait au premier rang. J’avais fait sa connaissance le dimanche soir précédent chez Jos. Laporte où j’avais soupé, veillé et dormi sur un lit de planches. Le lendemain M. Huenegard envoyait pour mon usage personnel chez M. Laporte son propre lit, arrivé le samedi et qu’il n’avait pas encore développé. N’ayant pas revu M. Huenegard depuis, bien qu’il soit encore à Rouyn, je lui redis un cordial merci. Je rappelle ici un incident. Le samedi soir, je dormais chez mon ami Laporte, un peu tassé, sur les planches, quand, tout à coup, voilà mon compagnon de lit qui se lève en sursaut et en habits de nuit, pieds nus, file dehors par un froid de 50° sous zéro. Au bout de quelques secondes, il revenait. « Heureusement que j’ai entendu, me dit-il. — » « — Qu’y avait-il ? — » Un individu pas frileux et pas gêné était venu s’emparer de quelques planches appuyées sur le camp et fuyait les emportant quand la prompt intervention du propriétaire le força de les échapper. —

Le 15, je m’étais rendu à l’invitation de M. Henry Blake — un anglais converti en Afrique par le Cardinal Lavigerie et je dormis sous son toit hospitalier. Le 17 au soir je couchais au Lac Rouyn, à la « landing » chez M. Chénier et le 18 j’y faisais la mission. Le même jour je revenais à Rouyn. Là à l’hotel des frères Campbell, où j’étais allé plus d’une fois — l’amabilité des hôtes étant parfaite, il m’était permis de rencontrer de nombreux voyageurs allant et venant aux chantiers de German’s Point, Vue du puit no  1 de la mine Amulet.[1] — je fis la connaissance de M. Pilon, le découvreur et le gérant de la mine Amulet. Il m’invita d’aller faire la mission chez lui. Dans l’après-midi, je profitai du départ d’une voiture allant dans cette direction et je me rendis à l’intersection du chemin de Makamik et Amulet, au ruisseau Duprat. A pieds, la valise de mission sur le dos, je grimpai quelques milles à travers la montagne jusqu’au campement où je fus reçu très bien. Le lendemain matin je faisais la mission. M. Pilon me fit visiter les travaux en cours et gentiment chargea un de ses hommes, Pat Dessureault, (de Makamik), de me conduire sur un devant de sleigh jusqu’à la « cache » Cinq-mars à quelques milles de l’Amulet ou je devais, le lendemain, continuer mon travail de missionnaire.

Avant de quitter Rouyn, j’avais été victime d’un petit vol. On m’avait enlevé les courroies de ma valise de mission. Quelques semaines plus tard le détective Bégin me les faisait retourner. Maintenant j’étais sur le chemin du retour enchanté de mon voyage. Pendant mon voyage à Rouyn, j’avais visité toutes les familles catholiques et même je m’étais rendu à l’invitation de quelques protestants. Je dois dire que, partout, je fus reçu avec courtoisie, avec joie même. Aussi ai-je gardé de cette mission un excellent souvenir.

Jusqu’aux chiens qui pullulaient alors à Rouyn et qui m’escortaient par groupe chaque fois que je sortais dans le village. Seul un attelage de huskeys refusa de s’appri-

  1. Ce type de puit d’exploration, surmonté d’un chevalement de bois démontable, permettait au mineurs de prospecter le sous-sol par une ouverture d’à peine un mètre de diamètre, Vavasour & Dick, vers 1930, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda.