Page:Leury - Histoire de Rouyn.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Souvenirs de mission, au début de Rouyn-1925


En décembre 1925, quelques citoyens du village naissant de Rouyn, rencontrés à Ste-Rose de Poularies, me priaient d’aller faire une mission à Rouyn.

Je demandai donc l’autorisation à Son Exc. Mgr  Louis Rhéaume, et, le 19 janvier 1925, M. le Curé J. Z. Tremblay, curé de Makamik m’embarquait dans sa voiture, et, « En route pour le pays de l’or ». A midi, nous prenions le dîner à la « cache Jutras » à la rivière Destor. Réfection prise, nous continuions notre voyage vers Rouyn où nous arrivions vers les 7 hrs du soir. Vus les jours très courts, à travers la forêt dense, dans un chemin de portage, l’obscurité était venue à « bon⁁ne heure » et la dernière partie du voyage nous parut longue. Arriverait-on, enfin ? Et ce fut une joie quand à travers la forêt brillèrent au loin les lumières de Rouyn. Nous y fûmes reçus avec empressement par M. Lucien Baril qui gérait pour le compte de son frère Donat, de Makamik, un étal de boucher.

Boucherie « Meat Market » tenue par Lucien Baril.[1]

La construction était un « schack » de 10 X 18 pieds. Il y avait là le comptoir, l’entrepôt et la cuisine servant également de dortoir. Cette bâtisse se trouvait à peu près en face du marché actuel. Le froid, la fatigue du voyage nous firent trouver bon la chaleur du poêle et nous dormîmes d’un profond sommeil. Le lendemain matin vers 7 hrs j’installai mon autel portatif sur la table et je dis la première messe à Rouyn, puis ce fut le tour de l’abbé Tremblay, M. Baril faisant fonction de servant de messe. — Il faut rappeler que l’hiver précédent, à l’endroit même où se trouvait à cette époque le campement de la mine Horne, à Noranda, M. l’abbé Fugère, curé de Mont-Carmel, Témiscamingue, faisant une tournée de missions dans les chantiers avait dit la messe à cet endroit, dans le chantier de l’international Paper Co.

Après le déjeuner servi par M. Baril, nous fîmes une première visite dans Rouyn, qui comptaient alors une quarantaine de campements en bois rond ou équarri, dispersés à travers la forêt. On allait par les sentiers d’une habitation à l’autre, puis l’abbé Tremble prit le chemin du retour. Moi, je restai encore trois jours. Durant cette première journée je nouai connaissance avec la population de Rouyn. Le 21, [mer?]cerdi, je célébrai cis [ai]s [?] la messe chez M.s [?] H.s [?] Juteau, boulanger-gendre du Dr Sa[?]er, d[ ]s Villa-Marie, si je me rappelle bien. Le 22, je disais la messe chez Dumulon, autrefois de Ville-Marie. Également le 23. Ce Mème jour je revenais à mon point de départ à Ste-Rose. La mission de Rouyn était inaugurée.


Bureau et prison de Rouyn (policiers Ephrem Bégin et Michael Tobin).[2]

Je devais faire une autre mission en mars suivant. Le 9 mars, de passage à Makamik, le curé de l’endroit éatant absent je recevais au presbytère la visite de deux messieurs, qui sollicitèrent des renseignements sur Rouynvi. Il faut dire qu’après mon premier passage à Rouyn j’avais adressé une lettre au Procureur Général de la province demandant avec instance qu’un poste de police provinciale fut installé à Rouyn, où n’existait encore aucun corps public. Le désordre, sous toutes ses formes, régnait en maître dans le camp minier [2 mots superposés] naissant. — Or ces deux messieurs étaient deux agents de la Sûreté provinciale, MM. Ephrem Bégin et Michael Tobin, qui étaient en route vers Rouyn où ils venaient établir le premier service d’ordre public. Je les renseignai le lendemain encadré de deux polices je reprenais le chemin de Rouyn. Le 11, conduit par le postillon, Conrad Luneau — actuellement marchand de Ste-Rose, nous arrivions à Rouyn, mettant pied à terre devant l’hôtel Osisko tenu par les cinq frères Green. Le tout Rouyn monté sur les bancs de neige assistait à l’arrivée. Je me suis toujours demandé comment la population de Rouyn était déjà au courant de la venue de la police provinciale, avant notre arrivée. Les uns étaient contents, les autres moins. Les « bootleggers », les « gamblers », les tenancières furent mécontents prévoyant qu’un frein serait vite mis à leur important commerce.


Hôtel Osisko tenu par les cinq frères Green[3]



  1. Vue de la boucherie « Meat Market » tenue par Lucien Baril, Vavasour & Dick, vers 1925, Fonds Fonderie Horne, BAnQ de Rouyn-Noranda. ; NdÉ.
  2. Vue éloignée de la façades et du profil droit du bureau et de la prison de Rouyn sous la garde des policiers Ephrem Bégin et Michael Tobin, Canadian National, vers 1925, Fonds L’Action catholique, BAnQ de Québec. ; NdÉ.
  3. Hôtel Osisko, tenu par les cinq frères Green à l’arrière duquel se trouvait le magasin général de Jos Dumoulon, Photographe inconnu, 1924, Fonds Ministère des Richesses naturelles, BAnQ Québec ; NdÉ.