Page:Lewis - Le Moine, Tome 1, trad Wailly, 1840.djvu/190

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

que vous cherchez a trouvé ce qu’il voudrait bien perdre. Ma main seule peut tarir le sang. Dites à votre maître de penser à moi quand l’horloge sonnera « une heure. »

« Comment ! » m’écriai-je en me levant brusquement du sofa. (Les paroles que répétait Théodore donnaient à penser que l’étranger était au fait de mon secret.) « Cours le chercher, mon enfant ! prie-le de m’accorder un moment d’entretien. »

« Théodore fut surpris de la vivacité de mon mouvement. Cependant il ne fit pas de questions, et se hâta de m’obéir. J’attendais son retour avec impatience. Peu de temps s’était écoulé lorsqu’il reparut et introduisit dans ma chambre l’hôte que j’attendais. C’était un homme d’un extérieur majestueux. Sa physionomie était fortement accentuée, et ses yeux étaient grands, noirs et étincelants ; mais il y avait dans son regard quelque chose qui, dès que je le vis, m’inspira une crainte, pour ne pas dire une horreur secrète. Il était habillé simplement, ses cheveux étaient sans poudre, et un bandeau de velours noir, qui ceignait son front, ajoutait encore au sombre de ses traits. Son visage portait les marques d’une profonde mélancolie, son pas était lent et son maintien grave, auguste et solennel.

« Il me salua avec politesse, et ayant répondu aux compliments ordinaires à toute présentation, il fit signe à Théodore de quitter la chambre. Le page se retira immédiatement.

« Je sais votre affaire, » dit-il, sans me donner le temps de parler. « J’ai le pouvoir de vous délivrer de votre visiteur nocturne ; mais cela ne peut pas être avant dimanche. À l’heure où commence le jour du repos, les esprits de ténèbres ont moins d’influence sur les mortels. Après samedi, la nonne ne vous visitera plus. »