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LA JEUNESSE DE NOVALIS

naître le ciel et les enfers, par toi, j’ai goûté aux fruits de l’arbre de la science. » Initié déjà par Reinhold et Schiller à l’idéalisme kantien, il apprend de Schlegel à mieux comprendre le Gœthe de l’époque classique et l’idéal de la culture hellénique. Il s’enthousiasme avec lui pour la Révolution française et cela avec d’autant plus d’ardeur, que son père et son oncle fulminaient avec toute l’indignation de bons et loyaux conservateurs contre les forfaits des sans-culottes et contre les idées nouvelles. Il pénètre à sa suite dans les arcanes de la philosophie de Fichte. Il suit dans les cahiers philosophiques de son ami qu’il se fait prêter, la genèse progressive de la pensée romantique.

À Leipzig, d’ailleurs, sa personnalité littéraire ne s’est pas encore formée. Sans doute Frédéric Schlegel, après lecture de ses premiers essais poétiques, lui prédit aussitôt un brillant avenir. « J’ai parcouru ses œuvres, écrit-il à son frère Guillaume. Aucune maturité dans la langue et la versification ; de constantes digressions ; une excessive longueur ; une surabondance d’images simplement ébauchées. Mais tous ces défauts ne m’empêchent pas de flairer en lui les qualités qui font le grand poète lyrique, une sensibilité originale et belle et une aptitude à percevoir toutes les nuances du sentiment. » Mais il semble bien que ce jugement ait été dicté à notre critique plutôt par l’impression vivante qu’il