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LE RETOUR À LA VIE

devient infinie et parfaite. Le moment lui paraît donc venu de fonder cette religion qui doit dominer toute la civilisation moderne et absorber la Révolution française comme jadis le christianisme avait absorbé l’Empire romain. Il s’ouvre de ce projet grandiose à ses correspondants, à son frère, et en particulier aussi à Hardenberg, à qui il reconnaît « plus de talent pour faire un nouveau Christ ». Lui-même se réserve le rôle de l’apôtre Paul. Dans une lettre datée du 2 décembre 1798, Schlegel expose tout au long à Novalis son « projet biblique ». Et celui-ci, qui était toujours demeuré chrétien par le cœur, entre volontiers dans les idées de son ami. Il prophétise lui aussi l’avènement d’une nouvelle humanité, « d’une Église jeune, comme enlacée furtivement par un Dieu d’amour et concevant un nouveau Messie dans ses membres innombrables ». Dès la fin de 1798, il prépare des « fragments chrétiens » que Schlegel attend avec une grande impatience. Au cours de l’année 1799, un enthousiasme moitié sincère moitié « artiste » pour le christianisme se propage dans tout le groupe romantique. Tieck, en initiant ses amis à la théosophie de Bœhme, lui donne un nouvel aliment encore. Novalis écrit dans le courant de 1799, sous le titre de Europe ou la chrétienté, l’apologie enthousiaste d’un catholicisme théosophique idéal. En même temps, il prépare avec Tieck un recueil d’hymnes et de sermons chré-