Page:Lichtenberger - Novalis, 1912.djvu/93

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
91
LE RETOUR À LA VIE

le catalogue nous a été conservé, était assez bien fournie. Pourtant il n’avait lu, si nous en croyons le témoignage de Tieck, qu’un petit nombre de poètes et était médiocrement informé des questions d’esthétiques et de haute critique. Il ne connaissait guère à fond que le Wilhelm Meister de Gœthe, qu’il avait lu avec enthousiasme et étudié avec amour au fur et à mesure de sa publication. Or voici qu’en 1799 il se rencontre, dans la maison des Schlegel à Iéna, avec Ludwig Tieck, le talent poétique le plus original de l’école romantique. Il le revoit à Giebichenstein chez le musicien Reichardt. Il le reçoit chez ses parents à Weissenfels. Et aussitôt se noue entre les deux romantiques une amitié enthousiaste. Novalis fait dater de sa liaison avec Tieck un nouveau chapitre de son existence : au contact d’un artiste authentique et spontané, d’un virtuose de la forme et de la technique, il prend conscience enfin de sa vocation de poète. Et cette assertion, sans doute, n’est qu’à demi vraie. Novalis n’avait jamais cessé d’être poète. Le fragment du Disciple à Saïs qui date de 1798, et sans doute aussi la première ébauche des Hymnes à la nuit, sont là pour attester que Hardenberg n’avait pas attendu qu’il eût connu Tieck, pour satisfaire l’instinct profond qui le portait vers la poésie. Il reste vrai que, à partir de ce moment, cet instinct devient chez lui plus impérieux et plus conscient. Nous le voyons