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LES SOURCES DE LA PENSÉE DE NOVALIS

possible, sans fausser la réalité historique, d’établir un contraste trop accusé entre mystiques et scolastiques. Le mysticisme allemand est né non pas d’une réaction du sentiment chrétien contre l’intellectualisme scolastique, mais, au contraire, d’un essor parallèle et convergent de la piété chrétienne et de la science chrétienne, c’est-à-dire de la scolastique. La piété catholique est le point de départ commun des mystiques comme des scolastiques. De même que l’intellectualisme d’un saint Thomas a ses racines dans une piété fervente et aboutit à la conception mystique, de la visio Dei, de l’extase où l’âme s’élève jusqu’à la contemplation directe de Dieu, ainsi la religiosité sentimentale des mystiques tend vers l’intellectualisme et aboutit non seulement à la contemplation et à l’extase, mais aussi à la spéculation philosophique. Entre un mystique et un scolastique, il n’y a donc pas une opposition de natures. Ils partent, en réalité, tous deux du même point et aboutissent au même point. Et les mystiques allemands ne forment point une exception à cet égard. Leur pensée s’est développée sur le sol de la scolastique et a subi l’empreinte irrécusable du thomisme. Ils sont bien des chrétiens authentiques, pleins de foi dans la vérité religieuse traditionnelle. Ils ne se sont pas sentis opprimés par le dogme catholique. Il n’ont pas voulu innover. Ils n’ont pas cru enseigner autre chose que les théo-