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Page:Lindau - Un voyage autour du Japon.djvu/26

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d’un usage général au Japon, et on l’emploie lorsqu’on se revoit pour la première fois après une courte ou une longue absence. Je l’ai toujours entendu avec plaisir. Il est beau que la première pensée d’un homme, au retour d’un ami ou d’un bienfaiteur, éveille le souvenir des services reçus, et il est doux que sa première parole soit un témoignage de reconnaissance. Il semble qu’à ces accents doivent se dissiper les nuages qui ont pu troubler la sérénité des relations passées pour ne laisser subsister que ce qu’elles ont eu d’agréable. L’ingratitude, qu’on reproche aux Chinois, n’est certainement pas le vice des Japonais. Ils gardent un long souvenir du bien qu’on leur a fait, de même qu’ils ne pardonnent pas le mal qu’on leur a causé. Reconnaissance et ressentiment sont des manifestations en sens contraire d’une seule et même qualité de l’âme. Qui porte cette qualité en soi est capable de dévouement et de haine : elle existe chez les Japonais, et il n’est pas besoin de rapporter à un autre mobile leur patriotisme fanatique et leur farouche passion de vengeance.

Si on voulait recevoir l’impression vive de ce que le Japon offre de curieux et d’étrange, il faudrait y arriver directement d’Europe. On aurait alors sous les yeux un spectacle d’un effet saisissant : tout ce qu’on verrait, tout ce qu’on entendrait serait pendant les premiers jour chose extraordinaire et di-