ſe nourrit auſſi de racines d’arbre, mais ne mange jamais de poiſſon[1]. On peut l’apprivoiſer & il eſt aſſez doux à moins qu’on ne l’ait irrité ou bleſſé, car alors il aſſaillit avec la plus grande hardieſſe, les barques qui ſont à flot & les hommes qui les montent. Il marche lentement ſur terre, ne franchit point les obſtacles, pas même les petites digues qu’il rencontre ſur ſon paſſage ; mais il nage avec beaucoup de viteſſe & plonge même au fond de l’eau, quoiqu’il n’y puiſſe demeurer longtems. Il ſe livre au ſommeil dans des iles entourées de roſeaux, ſituées au milieu des rivières, & la femelle y met bas ſon petit, lequel cependant elle allaite dans l’eau. Sa voix eſt moyenne entre le beuglement du bœuf & le mugiſſement de l’éléphant ; on l’entend de fort loin. Ses dents ſont très-blanches, & très-dures, même plus que l’ivoire & ne jauniſſent pas ſi aiſément ; c’eſt pourquoi on en fait des dents poſtiches pour l’homme. Sa chair eſt très-bonne à manger. On garnit des boucliers avec ſa peau.
L’hippopotame eſt preſque de la grandeur de l’éléphant ; ſon poids eſt de quatre à cinq mille livres ; il a quelquefois dix-ſept pieds de longueur & environ ſept pieds de hauteur. Quoiqu’il ait la tête très-groſſe, il reſſemble un peu au bœuf par le tronc & par le port ; par les pieds à l’ours, par ſa peau très-denſe & très-tenace au rhinoceros, par ſes dents canines, ſa queue, ſa croupe, ſon genre de vie, au cochon. Sa gueule eſt très-large. Oreilles menues & aiguës ; ciliées de poils courts & fins ; yeux petits ainſi que les narines ; des faiſceaux de poils aux levres ; dents canines longues quelquefois de vingt-ſept pouces & péſant ſix livres neuf onces ; dents molaires également très-blanches, au nombre de ſix ou huit de chaque côté des mâchoires. Peau de couleur obſcure, garnie de poils blanchâtres clair ſemés, un peu plus épais ſur le haut du cou ; queue chauve, longue d’environ un pied ; jambes courtes & groſſes ; lobes des pieds ſéparés.
- ↑ Mr. de Buffon dit le contraire, d’après la deſcription de l’hippopotame par le capitaine Covent. Voyage de Dampierre t. 3. p. 360. Voici le paſſage de cette deſcription : « l’hippopotame marche aſſez lentement ſur le bord des rivières, mais il va plus vite dans l’eau ; il y vit de petits poiſſons & de tout ce qu’il peut attraper. »