MESSIEURS,
Vous avez dû remarquer que dans toutes les lettres que jusqu’à ce jour j’ai eu l’honneur de vous adresser, je me suis attaché à ne rien dire qui eût l’ombre même d’une justification. J’ai voulu vous laisser le temps de faire un retour sur vous-mêmes et de vous apercevoir que votre zèle révolutionnaire vous a rendus victimes involontaires d’une mystification, et que vous avez frappé à gauche. Car pour me justifier, il aurait fallu que j’eusse été accusé : je ne F ai pas été. Pour accuserai aurait fallu une instruction préalable. Or, vous n’avez pas eu le temps de rassembler, dans un examen de la comptabiliié financière de la République — ce qu’exigeait le moindre souci de la justice et de l’équité — les moyens d’asseoir votre conviction. Aussi votre Décret du 27 avril n’est-il pas une accusation, il est un jugement de condamnation en forme : c’est donc à vous, mes juges — non à moi — à vous justifier de cette condamnation. La seule ressource qui me resterait dans cette conjoncture, serait d’en appeler au gouvernement provisoire, mieux informé, mais je ne l’emploierai pas ; votre Décret doit rester et il restera comme un monument de honte