Page:Lintier - Ma pièce, 1917.djvu/93

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Cependant Lucas a découvert des œufs.

— On va vous en faire une omelette au lard, nous propose la jeune femme, ça ne va pas être long. Mais asseyez-vous donc. N’y a-t-il pas assez longtemps que vous êtes debout ?

Tout de suite, la graisse grésille dans la poêle.

À chaque moment, des fantassins, des cavaliers frappent à la porte, et les deux femmes distribuent le lait de leur vache sans vouloir se laisser payer. Lorsqu’il n’en reste plus, elles sont désolées d’en refuser aux hommes qui arrivent sans cesse.

— Nous avons tout donné, mon pauvre monsieur, disent-elles. Il ne nous en reste qu’un méchant bol pour la petite fille. On n’a qu’une vache, pensez !

Un chasseur rapporte une marmite qu’on lui a prêtée, un autre emprunte un gril. Jamais les Français n’ont été aussi bien reçus en France.

À son tour, la jeune fille blonde, avec qui nous causions tout à l’heure, arrive, un pot à lait de grès à la main :

— Tante, as-tu du lait ? C’est des soldats qui en voudraient… Ils sont à moitié malades.

— Ma pauvre petite fille, il n’y en a plus que quelques gouttes pour la petite.

— C’est malheureux !

La jeune fille nous aperçoit attablés devant l’omelette au lard fumante, et nous sourit comme