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AUTOUR D’UNE AUBERGE

— Pourtant, ce matin, M. Rougeaud, il fallait être aveugle pour se tromper sur ce point. Je suis sûr que le plus grand nombre, la masse, est contre l’auberge, et moi j’aimerais qu’on l’abolisse au moins pour un an.

— Pourquoi n’attendons-nous pas une autre année ? Il n’y aurait pas grand mal ? Ce pauvre Bonvin qui a fait de si lourdes dépenses pour réparer sa maison, se trouvera ruiné… C’est une injustice, M. l’Ami, une injustice criante !

M. Rougeaud, je regrette pour Bonvin les dépenses qu’il a faites. Mais je considère comme un devoir de débarrasser la paroisse de cette buvette. Il n’y a pas d’injustice à mon point de vue, là dedans. Il était libre de ne pas faire ces dépenses. D’ailleurs, un aubergiste n’est-il pas toujours exposé d’une année à l’autre à perdre sa licence ? Pour moi, il me semble que nous commettrions une plus grande injustice envers nos co-paroissiens, si nous leur laissions l’auberge où se corrompent nos jeunes gens. M. Héroux, avant de commencer sa lutte, a dû, lui aussi, regarder la question à ce point de vue, car sa conscience de prêtre lui reprocherait certainement la moindre injustice qu’il pourrait commettre à l’égard de l’un ou l’autre de ses paroissiens. Aussi, je suis prêt à soumettre mon jugement au sien, sûr d’avance qu’il me dira de continuer comme j’ai commencé.

— Eh ! bien, l’Ami, je pensais que vous écouteriez