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Page:Lisbois - Autour d'une auberge, 1909.djvu/138

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AUTOUR D’UNE AUBERGE

intérêts de l’âme doivent passer avant les biens temporels, et qu’il vaut mieux tout perdre que de transiger avec les devoirs de la religion, aussi j’ai hésité longtemps avant de rendre ma réponse. Enfin, comme M. Rougeaud ne demandait ma parole que pour un an, et que cette parole suffisait pour éviter ma ruine et celle de ma famille, j’acceptai… Je signai donc l’engagement requis par Sellier… »

En disant ces paroles, l’Ami n’osait lever la tête et pleurait.

« J’étais pris, M. le Curé ; et, pour cela, je croyais ma faute moins grave… En partant, pour prix de ma faiblesse, il me remit soixante piastres, je vous les apporte ; elles me brûlent les mains. »

L’Ami tendit l’argent à M. Héroux qui, tout doucement, lui répondit :

M. l’Ami, il y a dans la vie plus d’une occasion où nous devons manifester hautement nos sentiments chrétiens ; lorsque l’Église, par la bouche de ses ministres, fait connaître aux fidèles la conduite qu’ils doivent tenir dans les questions qui touchent la religion et la morale, tout chrétien doit être prêt à subir certaines pertes plutôt que de transiger avec sa conscience. Dieu, mon cher ami, sait récompenser, quelquefois même dès cette vie, les chrétiens qui ont le courage de leurs convictions religieuses. Il est le Maître, et sait faire tourner à notre plus grand bien les