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Page:Lisbois - Autour d'une auberge, 1909.djvu/142

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AUTOUR D’UNE AUBERGE

saires ne venaient pas la voir, elle conçut des craintes. Qui sait, se dit-elle, si on ne consultait pas M. le Curé ! Que deviendrions-nous, mon vieux père et moi ? Ces inquiétudes se changèrent bientôt en réalités. En effet, elle eut un jour la visite d’une jeune personne.

— Vous êtes Melle Marie Bonneterre, dit celle-ci en entrant.

— Oui, Mademoiselle, répondit Marie.

— Moi, dit l’étrangère, je suis Anne Jolicœur ; jusqu’à cette année, j’ai enseigné au village des Trois-Saumons. C’est vous qui, l’an dernier, avez enseigné ici ?

— Oui, Mademoiselle, il y aura bientôt cinq ans que je suis l’institutrice de la paroisse.

— Je suis heureuse de vous voir, reprit Melle Jolicœur, j’ai appris que vous preniez un repos mérité cette année, et l’on m’a offert de vous remplacer. Je sais un peu d’anglais et l’on me promet un salaire de cent cinquante piastres si je veux accepter. Je suis pauvre, on ne s’enrichit pas dans notre carrière, Mademoiselle, aussi serait-ce pour moi un aubaine que de gagner $150.00 annuellement. Mais, vous pleurez ! Melle Bonneterre, qu’avez-vous donc ?

Cette dernière, n’en pouvant croire ses oreilles, fut si surprise d’entendre dire qu’on avait fait des démarches pour la supplanter qu’elle ne put retenir ses larmes, à la grande surprise de Melle Jolicœur.